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LA PHILOSOPHIE
DE
L’HISTOIRE EN ALLEMAGNE

NOUVELLES ÉCOLES : M. H. FICHTE ET M. TH. MOMMSEN.



Quand on interroge, soit en France, soit en Allemagne, la direction des idées philosophiques, il est impossible de ne pas être frappé de l’abandon presque général des études purement spéculatives. L’histoire des faits a remplacé la science des principes, et dans les faits mêmes on cherche surtout le détail, les traits particuliers des événemens, la physionomie précise des acteurs. On ne s’élève plus, comme autrefois, au-dessus de la multiplicité des phénomènes pour chercher la loi qui les produit ; on se plonge au contraire dans le courant des choses contingentes, et c’est à travers ce flux perpétuel, comme disait Héraclite, qu’on poursuit la vérité immuable. En un mot, pour les plus hardis investigateurs de nos jours, la philosophie du droit, c’est l’histoire du droit, la philosophie des langues, c’est l’histoire des langues, et la philosophie de l’esprit humain, c’est l’histoire de l’esprit humain dans toutes ses manifestations à travers les âges.

Est-ce là une tendance particulière à notre siècle ? est-ce simplement la fatigue produite par l’abus des systèmes ? On a pu dire, surtout en considérant l’Allemagne, que cet abandon de la théorie n’était qu’une crise passagère ; on a pu dire que c’était un symptôme de lassitude ou d’épouvante après les excès du délire : il serait