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cabinet et les dispositions des partis à son égard ? Jusqu’ici, les progressistes se sont plu à espérer des concessions plus larges, et c’est pour cela qu’ils ont paru soutenir le ministère. Aujourd’hui il commence à n’en être plus de même. Le général O’Donnell pourra rallier encore quelques hommes sensés de ce parti ; les fractions plus avancées prennent déjà une attitude décidée d’hostilité. D’un autre côté, les modérés, après avoir fait une rude guerre au président du conseil dans le premier instant, reviendront-ils vers lui au moment où il atteste des sentimens conservateurs ? Il y a de terribles incompatibilités d’humeur à vaincre. Le ministère du général O’Donnell est, comme on le voit, réduit à lutter sur un terrain périlleux, ayant contre lui des adversaires acharnés et obligé de se créer un parti, s’il veut vivre.

La Hollande vient d’inaugurer par de brillantes fêtes, auxquelles le pays tout entier s’est spontanément associé, la majorité politique du prince d’Orange. Amsterdam et La Haye ont rivalisé pour donner un relief particulier à ces fêtes, et c’est encore sous l’impression de ces solennités dynastiques et populaires que le roi a ouvert la session nouvelle des états-généraux, accompagné pour la première fois par l’héritier présomptif de la couronne. Cette session, ouverte il y a peu de jours, offre d’ailleurs un certain intérêt, soit par les conditions dans lesquelles elle s’accomplit, soit par les questions qui seront sans doute l’objet d’une discussion publique. Le ministère actuel de La Haye est presque tout nouveau pour le parlement. Lorsqu’il se formait il y a quelque mois, les chambres étaient suspendues de fait pour quelque temps. On voulait laisser au cabinet nouveau la liberté nécessaire pour combiner ses plans et étudier les affaires demeurées sans solution par suite de luttes prolongées. C’est donc à peu près pour la première fois que le ministère se trouve devant les chambres, et il se présente avec un esprit sincèrement constitutionnel, avec l’intention, hautement avouée dès le premier instant, de pratiquer au pouvoir un libéralisme modéré. Quant aux projets importans et divers dont le cabinet s’est occupé dans l’intervalle des deux sessions, ils sont énumérés dans le discours du roi, qui est le meilleur résumé de la situation du pays, et qui constate la marche sûre et prospère de la Hollande. Maintenant il faut savoir si des luttes des partis ne se réveilleront pas, si les rapports entre le ministère et les chambres ne seront point troublés.

Jusqu’ici, le discours royal n’a produit que de favorables impressions, et le cabinet n’a point à se plaindre des premières opérations du parlement. C’est le candidat du parti libéral modéré, M. van Reenen, qui a été élevée la présidence de la seconde chambre ; il avait pour concurrent M. Dussert, qui appartient à une nuance de libéralisme plus avancée, et dont la candidature a rallié du reste à une minorité assez compacte. Quoi qu’il en soit, le résultat définitif a été favorable à M. van Reenen, qui a été ministre de l’intérieur pendant plusieurs années et qui est un homme considéré, jeune encore, laborieux et franchement constitutionnel. C’est sans doute à propos de toutes les affaires d’intérêt positif que des discussions sérieuses s’élèveront au sein des chambres hollandaises. Le parlement de La Haye va notamment avoir à s’occuper d’une question qui a singulièrement agité les esprits depuis quelques mois, et qui est en effet d’une réelle importance dans un pays placé comme la Hollande : c’est la question des chemins de fer.