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pas, ni nous non plus ; aussi conclut-il avec regret à la confirmation de l’arrêt de la cour de Metz et à la condamnation de M. Oster pour sa contravention à l’arrêté municipal, conclusions auxquelles la cour de cassation fait droit par son arrêt.

Cette décision n’était pas, comme on le voit, d’un grand secours pour la liberté des cultes, qui ont besoin non-seulement de s’exercer, mais encore de s’exercer quelque part, et qui ne peuvent exister, comme toutes les choses humaines, que dans le temps et dans l’espace. L’abrogation présumée de l’article 291 serait donc pour eux, il faut bien le remarquer, d’un mince avantage, si, par l’art. 294, l’administration restait maîtresse de refuser à un culte tout emplacement en ce monde, et de ne lui laisser d’autre asile que la conscience de ses sectateurs. M. Dupin ne craignait pas cependant cette funeste conséquence, parce qu’il avait un remède tout prêt contre cet abus d’autorité, et ce n’est pas la partie la moins instructive de ce curieux épisode. En sortant de la cour de cassation, M. Dupin court à la chambre, et défend comme député la cause qu’il a été forcé d’abandonner comme jurisconsulte. Il interpelle le ministère; il expose les faits, cite l’arrêté du maire et le flétrit; il raconte avec tristesse comment la justice a dû venir en gémissant au secours de l’administration, et s’est vue légalement contrainte de donner une sanction pénale à un acte qu’elle réprouve. L’administration doit pourtant compte de ses actes à la chambre; la chambre a devant elle des ministres responsables, qui doivent s’expliquer et faire justice. En effet, M. Sauzet, alors garde des sceaux, monte à la tribune : il ignore tout, dit-il, mais il aura soin de tout apprendre, et rien n’égale son respect pour la liberté des cultes. Le Moniteur note ici des marques d’approbation, et l’affaire en reste là. Nous ne savons pas au juste si l’arrêté du maire a été annulé par le ministre; il a peut-être tenu bon et traversé heureusement ce court orage. Le roseau administratif a toujours plié à propos devant les tempêtes législatives, mais il s’est rarement rompu. Supposons néanmoins que l’arrêté du maire de Metz ait été cassé : était-il bon que la liberté des cultes eût besoin pour vivre de ce remède héroïque et permanent des interpellations, des votes de la chambre et des appels menaçans à la responsabilité des ministres? Que penserait-on d’une horloge dont l’aiguille pourrait être arrêtée par tout le monde et ne pourrait être remise en mouvement que par l’horloger? Et ce parlement qui sert d’horloger sera-t-il toujours disposé à faire son devoir? En sera-t-il toujours capable? Et pour le lui rappeler aura-t-on toujours sous la main, comme en cette occurrence, un bon citoyen, un député courageux, défenseur inflexible des libertés publiques? Qu’on se figure enfin que M. Dupin n’eût trouvé au sortir