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Tous ces phénomènes physiques sont unis par tant de caractères communs, que des esprits superficiels, entraînés par l’envie de généraliser, les confondent quelquefois absolument. C’est là qu’est recueil de la physique nouvelle. Il est bien séduisant, surtout quand on veut passer pour profond, d’annoncer que chaleur, lumière, électricité, magnétisme, ne sont qu’une seule et même chose. Ceux qui ne se contentent point d’ambitieux aphorismes verront au contraire, avec un peu de réflexion, que les découvertes récentes, en même temps qu’elles révèlent tout ce qui unit les phénomènes physiques, ont aussi fait éclater ce qu’ils ont d’individuel. Melloni, par exemple, n’a-t-il pas prouvé que la transparence, faculté que possèdent les corps de laisser passer plus ou moins bien les rayons lumineux, n’a rien de commun avec la facilité de pénétration qu’ils offrent aux rayons de chaleur ? L’alun, très transparent pour la lumière, est fort peu transparent, qu’on me passe le mot, pour la chaleur ; le sel gemme au contraire n’arrête jamais la chaleur, même quand on le noircit de façon à le rendre entièrement opaque.

Les forces naturelles ne sont donc pas identiques, elles sont seulement corrélatives : j’emploie à dessein ce mot, qui sert de titre à l’ouvrage de M. Grove, et s’y retrouve à chaque page. Le physicien anglais entend par corrélation des forces physiques l’ensemble des rapports qui unissent mutuellement ces forces et président aux transformations réciproques qu’elles subissent. Avec des courans électriques, on peut aimanter les corps ; l’aimantation, à son tour, fait naître des courans : nous dirons donc que le magnétisme et l’électricité sont des forces corrélatives.

Le principe de la solidarité des forces physiques avait déjà été exprimé en termes très formels par OErsted. Le célèbre auteur de l’Esprit dans la nature était disposé, par ses spéculations métaphysiques, à regarder toutes les modifications de la matière comme de simples transformations du mouvement. « Les recherches les plus récentes, écrivait-il vers la fin de sa vie, ont rendu très probable cette opinion, que la lumière est produite par les vibrations d’une matière subtile partout répandue, que l’on nomme éther ; mais si la lumière consiste en de telles vibrations, la chaleur rayonnante doit se trouver dans le même cas. En effet, il y a déjà longtemps que nous avons des raisons suffisantes de regarder la chaleur comme une radiation, qui ne se distingue de la lumière que par la lenteur plus grande des vibrations. La facilité avec laquelle nous convertissons l’électricité en chaleur, quand nous opposons une résistance à un courant, donne à penser que l’électricité ne dépend pas moins d’un état vibratoire, et qu’il suffit de condenser ces vibrations pour constituer les vibrations de la chaleur. Cette opi-