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sée, plus affaiblie qu’elle ne l’a jamais été avant 1848, car il va sans dire que, le régime constitutionnel une fois rétabli pour la Hongrie, il faudrait immédiatement donner une constitution particulière aux provinces austro-allemandes, et ces deux grandes divisions de l’empire ne tarderaient pas à devenir aussi étrangères l’une à l’autre que le sont la Suède et la Norvège. Or il est clair que dès ce moment l’Autriche serait descendue de son rang de puissance de premier ordre.

Mais à côté de ce parti il en existe un autre, beaucoup plus nombreux et plus puissant, quoique peut-être moins habilement organisé, moins actif que celui-là. Ce parti rejette la centralisation, et il appuie en même temps de toutes ses forces l’unité politique. Il veut le self-government tel qu’on le pratique en Angleterre, c’est-à-dire l’indépendance des communes dans leurs affaires locales, l’administration de ces affaires par la gentry et les classes intelligentes, propriétaires et domiciliés dans la localité; il réclame des assemblées provinciales qui se borneraient strictement à traiter des questions d’administration à l’exclusion de la politique. Enfin, pour couronner cet édifice et retenir les assemblées provinciales dans leurs limites, il demande une représentation nationale dans la capitale de l’empire, ne fût-ce qu’un corps ayant voix consultative, ne fût-ce même qu’une assemblée désignée et convoquée, mais régulièrement convoquée par le souverain. Le parti dont nous parlons considère cette représentation nationale comme le moyen le plus efficace, le seul efficace même, d’établir solidement l’unité politique de l’empire, de fortifier le gouvernement, d’amener peu à peu une fusion bienveillante entre les différentes nationalités, et d’amortir ce qu’il y a de trop âpre dans l’esprit d’indépendance de telle ou telle province. Il croit finalement qu’une représentation nationale, même si elle ne devait avoir qu’une voix purement consultative, offrirait au pays de puissantes garanties relativement à l’administration des finances et au rétablissement du crédit national, ainsi qu’en matière de législation. Par conséquent un tel système serait précisément le complément des institutions promises et reconnues nécessaires par le manifeste impérial du 31 décembre 1851[1].

On le voit, les hommes qui tiennent ce langage ne sont point des

  1. Un écrit publié à Vienne en 1850, sous ce titre : La Centralisation et la Décentralisation en Autriche (Centralisation und Decentralisation in OEsterreich), peut être considéré comme contenant le programme du parti dont nous parlons. L’auteur de cet essai est M. Le baron d’Andrian, un des hommes les plus distingués de ce parti, que nous avons connu en 1848 et 1849 comme envoyé extraordinaire de l’archiduc Jean, alors vicaire de la confédération germanique, auprès de la reine Victoria.