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M. Delacroix, et un itinéraire d’Alaise dû à la plume de M. Castan, archiviste de Besançon. Il paraît que la surface du massif est littéralement couverte de débris, et que les antiquités celtiques fournies par cette région et réunies à Besançon forment dès aujourd’hui le plus beau musée celtique de France. Peut-être rencontrera-t-on dans ces décombres quelque document certain ; peut-être pourra-t-on prouver non-seulement qu’Alaise était un oppidum, mais surtout que cet oppidum était bien celui qui fut défendu par Vercingétorix contre César, car toute la question est là. Pour notre part, nous ne demandons pas mieux que d’être convaincu, et nous n’éprouverons aucune humiliation à déclarer que nous n’avons pas raisonné juste lorsque nous avons placé en Bourgogne la rencontre suprême des Gaulois et des Romains. Il y a mauvaise grâce à dire qu’on est prêt à recevoir de César une leçon d’art militaire ; mais si l’on me démontre mon erreur, je suis très disposé aussi à préférer la stratégie de Vercingétorix à la mienne, tout barbare qu’il était, car je fais le plus grand cas de son caractère et de son mérite ; j’en suis fier comme d’une de nos gloires nationales. Je me souviens encore de l’émotion que me causait dès mon enfance le récit de sa lutte contre César. Quoique le temps ait modifié mes idées sur bien des points, quoique la conquête romaine ne m’inspire plus la même indignation et que je reconnaisse tout ce que lui doit notre France moderne, j’ai conservé la même chaleur d’enthousiasme pour le héros arverne. À mes yeux, c’est en lui que se personnifie pour la première fois notre indépendance nationale, et, s’il était permis de comparer un héros païen avec une vierge chrétienne, je verrais en lui, au succès près, comme un précurseur de Jeanne d’Arc. L’auréole du martyre ne lui manque même pas ; six ans de captivité et la mort reçue de la

    quelle série de vérifications doivent passer les levés de nos officiers d’état-major avant d’être livrés à la gravure, quand on a eu quelquefois l’occasion d’en constater sur le terrain la parfaite exactitude, on a dans la carte du dépôt de la guerre une foi qu’il est difficile d’ébranler. Au reste, ceux qui ont le goût des dissertations historiques feront Bien de lire les Conclusions pour Alaise, ils y trouveront une lecture fort attrayante, et, avons-nous besoin de le répéter, autant de talent que d’érudition. Nous nous abs— tiendrons, dans notre incompétence, d’émettre une opinion sur la partie philologique et archéologique de cette brochure. Devons-nous avouer pourtant que certaines étymologies nous ont causé quelque surprise ? Ainsi Camp-Brésy serait une corruption de Castra Brutiaca, camp de Brutus, qui ne paraît pas avoir commandé aucune partie des lignes pendant le siège, mais qui fut chargé d’une mission spéciale pour repousser le dernier assaut de Vercingétorix. Ainsi encore Château-Dame-Jeanne tirerait son nom d’un ancien temple de Junon. La tradition veut que ce lieu ait été le théâtre d’un échec essuyé par les Suédois, qui ont dévasté la Franche-Comté de 1632 à 1642 : M. Quicherat pense que la tradition se fourvoie. Selon lui, le combat a été livré non pas au xviie siècle de notre ère, mais 52 ans avant Jésus-Christ ; ce ne sont pas les soldats du duc Bernard, ce sont ceux de Vercassivellaun qui ont été battus sur ce point.