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sons pas que dans l’ensemble il soit possible de tirer plus ingénieusement parti du terrain pour essayer d’y placer le dernier grand choc des Celtes et des Romains, tel qu’il nous a été raconté par le vainqueur. Si M. Delacroix n’a pas plus complètement réussi, nous ne pouvons attribuer l’insuffisance de sa démonstration qu’à une seule cause, et nous sommes forcé de répéter une phrase que, depuis le commencement du différend, on s’est de part et d’autre renvoyée plusieurs fois avec un simple changement de voyelle : Alaise n’est pas Alesia.

    tion gauloise ; elle s’appuie aux deux bouts de la gorge du Lison. À l’est, les Romains avaient un premier camp situé en-deçà d’Amancey, entre Éternoz et Coulans, et plus loin, à dix kilomètres du massif, un camp avancé et fortifié, situé entre Chassagne et Flagey. Ces deux grands quartiers étaient reliés par des ouvrages détachés de moindre importance.
    Nous croyons devoir rappeler ici ce que nous nous sommes déjà permis d’avancer. Si la circonvallation n’est pas complète, si elle ne protège pas tout le revers de la contrevallation, elle est inutile et dangereuse. Les ouvrages détachés, avant l’invention de la poudre, ne pouvaient pas jouer le rôle qu’ils remplissent dans nos guerres modernes.
    6° Comme déjà l’on s’étonnait de voir les soldats romains exécuter en si peu de temps les vingt-trois redoutes et les trente-sept kilomètres de retranchemens que comportait la double enceinte, comme maintenant il faudrait imposer aux légionnaires un grand surcroit de travail pour recommencer en partie la contrevallation et construire les ouvrages avancés, M. Quicherat, sur plusieurs points des lignes, supprime un, deux, même les trois fossés et les défenses extérieures.
    Cette opinion est contraire à celle qui est développée dans le mémoire de Berlinghieri (pages 115 à 118) ; c’est cet auteur qui nous a fourni l’interprétation que nous avons donnée de ces mots magnitudino munitionum, et bien que toutes ses théories ne nous paraissent pas paroles d’Évangile, nous le citons volontiers, parce que M. Quicherat vante avec raison sa profondeur et sa sagacité. Nous lui emprunterons encore une remarque fort juste, et dont il faut, selon nous, tenir grand compte dans l’interprétation des Commentaires : c’est que la langue latine était loin d’avoir dans son vocabulaire militaire la précision que les langues modernes ont acquise. à chaque instant, il faut avoir recours à des périphrases, et des mots différens sont souvent employés pour rendre des choses semblables.
    7° César aurait abandonné à ses lieutenans l’exécution des ouvrages avancés, ce qui est bien peu d’accord avec son extrême activité et sa vigilance bien connue, ou du moins, l’événement ayant prouvé que cette exécution était imparfaite, il en aurait rejeté la responsabilité sur ses lieutenans, ce qui est peu conforme à sa façon habituelle de traiter ses subordonnés.
    8° La colline au nord (erat à septentrionibus collis) serait le plateau d’Amancey, qui est situé à l’est, et qui a soixante-quatre kilomètres de tour ! Les retranchemens, dont on a reconnu les traces, et dont nous venons de signaler l’emplacement (n° 5), coupant ce plateau vers le milieu, M. Quicherat trouve que cette disposition s’accorde parfaitement avec le texte de César, puisque ce dernier, a dit « que la totalité de la colline n’avait pu être enveloppée d’ouvrages. » (Page 88 des Conclusions pour Alaise.)
    9° Le quartier occupé par les deux légions de Rebillus et de Reginus était le camp avancé situé entre Flagey et Chassagne, à dix kilomètres du massif. C’est ce retranchement que ces lieutenans défendent contre Vercassivellaun. C’est là que Labiénus vient