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environs des montagnes., telles que celles de Bousguer au Chimborazo, de Maskelyne et Hutton sur le Shehallien, de Carlini au Mont-Cenis, ne peuvent révéler que des densités exceptionnelles, parce qu’elles trahissent l’influence de masses qui altèrent la symétrie terrestre. La balance de torsion, véritable pendule horizontal, fournit une autre méthode : imaginée par Cavendish, elle a été employée récemment par Reich en Allemagne et par Bailey en Angleterre. La densité moyenne de la terre, admise par M. de Humboldt d’après la comparaison de ces travaux, est de 5,62, chiffre très élevé, qui démontre que le noyau terrestre est formé de matières beaucoup plus lourdes que toutes les roches que nous pouvons découvrir à la surface.

Parmi ce que nous avons appelé les fonctions terrestres, le magnétisme occupe une place des plus importantes. On trouve dans le nouveau volume du Cosmos l’exposé le puis complet des phénomènes magnétiques. C’est à M. de Humboldt que la science encore naissante qui s’occupe d’en rechercher les lois doit ses progrès les plus récens : grâce à ses sollicitations, le gouvernement russe a semé ses immenses territoires, en Asie comme en Europe, d’observatoires magnétiques et météorologiques. C’est aussi d’après ses avis que l’Angleterre en a élevé dans ses colonies, à Toronto, au Canada, à Hobart-Town, dans la terre de Van-Diémen, au cap de Bonne-Espérance. Ses encouragemens n’ont manqué à aucune des expéditions scientifiques qui sont allées étudier le magnétisme terrestre dans les parages les plus lointains. Cette science, aujourd’hui servie dans de nombreuses stations par des instrumens d’une extrême délicatesse et d’une grande perfection, armée de méthodes rigoureuses dues à la pénétration de Gauss, est désormais en état de faire de rapides progrès.

Les forces qui agissent sur l’aiguille aimantée varient, comme on le sait, aux divers points de la terre, non-seulement en direction, mais en intensité. Pour connaître la direction, il faut deux instrumens : l’un mesure la déclinaison, c’est-à-dire l’angle que fait l’aiguille aimantée avec le nord, l’autre l’inclinaison, ou l’angle que fait avec l’horizon un barreau aimanté qui peut se mouvoir librement autour de son centre de gravité. Quant à l’intensité de la force magnétique, on la mesure à l’aide d’un appareil unique. Quand on veut peindre aux yeux la répartition du magnétisme terrestre, on joint sur un globe les points où ces divers élémens ont la même valeur. On obtient ainsi trois séries ou systèmes de courbes, les unes qu’on nomme isogoniques ou d’égale déclinaison, les autres isocliniques ou d’égale inclinaison, les troisièmes isodynamiques ou d’égale intensité. Il y a longtemps déjà qu’on a tracé les premières sur les cartes marines : ce sont en effet les seules qui soient importantes pour la navigation. Les lignes qui réunissent les points où la boussole fait le même angle avec le nord peuvent être considérées comme les méridiens magnétiques, mais elles dévient singulièrement des méridiens terrestres. Dans le nombre, il faut distinguer celles où la déclinaison, passant de l’est à l’ouest, devient nulle : alors la boussole est exactement dirigée vers le nord. Dès 1492, Christophe Colomb avait, dans son premier voyage en Amérique, traversé une de ces lignes remarquables, qui est placée dans l’Atlantique : une autre, avec les inflexions les plus bizarres, traverse la Nouvelle-Hollande, l’Asie orientale et septentrionale.

Les lignes d’égale inclinaison sont beaucoup plus rapprochées des parallèles