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traitent les malades à l’aide de remèdes naturels. Les medas n’emploient que des influences magiques. Ils forment des confréries respectées, auxquelles on n’est admis qu’après des cérémonies bizarres, et en fournissant des preuves de capacité et de finesse d’esprit. La naissance ne donne aucun titre à cette distinction. De là vient que ces sociétés ne se recrutent que des personnes les plus intelligentes et les plus rusées de chaque tribu.

Lorsqu’un meda doit traiter quelque malade, on lui dresse une cellule avec des branches d’arbre garnies de leur feuillage. Ce sont des membres de la société mystérieuse qui construisent ce cabinet de verdure, et qui savent fort bien quelles espèces d’arbres ils doivent employer, quelles autres il faut exclure. Une grande importance est attachée à ce point, ainsi qu’à la forme de la cabane, à la situation, aux dispositions de ses dehors et de son intérieur. Ces formalités minutieuses sont toutes considérées comme également indispensables, et l’on ne manque pas de découvrir que l’une d’elles a été omise ou mal remplie, lorsque l’opération n’obtient aucun effet. Dès que les premiers préparatifs sont terminés, le meda qui doit exercer son ministère s’avance escorté de quelques-uns de ses confrères et des parens du malade. Il porte un tambourin, des sonnettes et des talismans : de formes variées. Il examine d’abord la cellule, et il en fait le tour en récitant des formules magiques. Ensuite il y entre et exécute de nouvelles cérémonies. Enfin le malade est introduit dans la loge, ou bien on l’y porte sur un brancard, s’il est trop faible pour marcher. On l’étend sur un lit dans la position prescrite par les rites, car tout est prévu, tout est minutieusement réglé. Personne ne peut entrer sans être invité ; mais les spectateurs peuvent se tenir debout tout autour de la loge. Cette loge doit être dressée sur une colline, afin que l’horizon soit découvert de tous côtés ; elle n’a pas de toit, afin qu’on puisse considérer le ciel, car on tient compte de l’état de l’air, de la forme des nuages, des vents qui soufflent et de tous les phénomènes de l’atmosphère. Une autre particularité digne de remarque, c’est que les medas ne prêtent leur ministère que dans le cas où les empiriques ont vainement épuisé leur science. Ils pensent qu’on ne doit recourir aux moyens miraculeux que lorsque ceux que fournit la nature se sont trouvés insuffisans. De cette manière, s’ils opèrent la guérison, elle passe plus sûrement pour merveilleuse, et, s’ils échouent, il leur est plus aisé de trouver une excuse en disant que l’ordre de la nature doit avoir son cours.

Dans les cérémonies usitées pour la réception des nouveaux membres de leur confrérie, les medas se guident au moyen de tablettes sur lesquelles sont peintes vingt-deux figures, à la fois symboles et signes mnémoniques. Comme symboles, elles représentent les vertus mystérieuses de la cérémonie ; comme signes mnémoniques, elles rappellent des couplets qui doivent être chantés. Le grand-esprit, le postulant, la loge où doit avoir lieu l’initiation, la réception définitive, l’arbre mystérieux des medas, divers oiseaux symboliques, le ciel, etc., tels sont les sujets représentés sur ces tablettes. Ce qu’il y a de remarquable, c’est que ces figures ont une sorte de signification métaphorique. Une flèche représente l’agilité de l’esprit, qui peut se transporter instantanément d’un lieu dans un autre. Telle figure exprime d’une manière non moins symbolique ce dogme, que Dieu est partout,