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étroites, le grenadier aux fruits écarlates, le cactus épineux, le mûrier et l’arbousier qui se plaît également sur les versans des Pyrénées. Dans les lieux plus frais, l’Européen retrouve le châtaignier et le noyer. Enfin au milieu des plaines, dans le voisinage de la mer, fleurissent le citronnier et l’oranger, dont la vue rappelle les pays privilégiés où il ne gèle pas, et par-dessus la tête arrondie des figuiers se dresse le vert panache du dattier, comme le minaret au-dessus du dôme de la pagode.

C’est une si belle chose qu’une contrée chaude où l’hiver n’ose pas s’arrêter, tant il a peur du soleil ! En lisant la Notice sur la Régence de Tunis, on se rend parfaitement compte du charme que peut exercer sur ceux qui l’ont habité longtemps ce pays favorisé du ciel, célèbre dès les temps anciens, chaque année plus florissant, et dans lequel les mœurs vont en s’adoucissant toujours. Écrit sans prétention littéraire et rempli de documens historiques et statistiques, ce livre porte la marque d’une vive sympathie pour la France. Peut-être ne fait-il que retracer en toute justice le grand et noble rôle que notre pays a joué à Tunis, comme dans d’autres états du Levant, depuis les croisades. Quoi qu’il en soit, l’important ouvrage publié sous le titre modeste de Notice se distingue par un mérite assez rare : il fait très bien comprendre et il fait aimer le pays dont il parle. Quel dommage qu’un dessinateur de Genève capable de rendre l’Orient comme Calame entend la puissante nature des Alpes, comme Topffer savait exprimer la sérénité des vallées de la Suisse, n’ait pas été chargé d’y joindre quelques illustrations!


TH. PAVIE.


On nous signale une inexactitude qui s’est glissée dans le récit d’un curieux épisode de la guerre d’Orient, — la campagne de la Dévastation, — publié récemment par la Revue des Deux Mondes (livraisons du 1er et du 15 février). L’auteur de ce récit parle du colonel Muller comme s’étant distingué, à la tête du 95e de ligne, dans les mémorables faits d’armes de Traktir et de Kinburn. Le nom de ce colonel est Danner, et le brave officier qui le porte est aujourd’hui maréchal de camp. D’autres passages du même récit ayant été interprétés d’une façon certainement contraire à la pensée de l’écrivain, nous croyons devoir répondre également aux observations qui nous ont été présentées à ce sujet. C’est à tort qu’on a prêté à l’auteur l’intention de faire ressortir le rôle de la Dévastation devant Kinburn aux dépens de celui des autres batteries flottantes, et des bâtimens de l’escadre en général. Dans cette partie du récit comme dans toutes les autres, la place qu’occupe la Dévastation s’explique par le cadre même où l’auteur s’est renfermé. S’il avait voulu raconter l’histoire de la flotte au lieu de recueillir simplement quelques souvenirs, il aurait reconnu que les trois batteries flottantes, se suivant à deux cents mètres de distance, avaient eu chacune sa part glorieuse soit au début, soit à la fin du combat de Kinburn. C’est là un fait que nous aimons à constater en expliquant les véritables intentions du narrateur.


V. DE MARS.