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il fit partir pour Calais une ambassade à la tête de laquelle était son chancelier, Mercurin Gattinara. François Ier s’était également soumis à cette sorte de juridiction du roi d’Angleterre[1], devant laquelle comparurent ses commissaires conduits par le chancelier Du Prat.


VII.

La conférence de Calais s’ouvrit le 4 août, présidée par l’astucieux cardinal Wolsey[2]. Sous l’apparence d’une médiation scrupuleuse se cachait la plus insigne fourberie. Au moment même où Henri VIII se présentait en arbitre, il agissait déjà en ennemi. Il faisait lever des troupes en Angleterre pour le service de l’empereur. Médiateur simulé, Wolsey avait pour mission réelle et secrète d’établir une union étroite entre Henri VIII, Charles-Quint et Léon X. Il devait, après un certain temps d’inutiles tentatives pour rapprocher François Ier et Charles-Quint, se rendre de Calais à Bruges, sous le prétexte d’obtenir de l’empereur qu’il renonçât à des prétentions trop obstinément soutenues par ses plénipotentiaires, et en réalité afin de conclure avec lui l’alliance projetée. Sept jours avant l’ouverture de la conférence, sir Richard Pace lui écrivait, de la part d’Henri VIII[3], que le roi, selon son avis, était résolu à équiper six mille archers, pour qu’ils fussent prêts à entrer en campagne. Il ajoutait : « Lorsque tout aura été conclu avec l’empereur, la résolution étant prise d’envahir la France, le roi pense qu’il devra être pourvu par eux deux aux moyens de détruire la flotte du roi très chrétien. » Voulant joindre la surprise à la perfidie, Henri VIII demandait que ce coup fût frappé d’une manière inattendue, afin de l’être d’une façon certaine.

Tout se passa ainsi qu’on l’avait arrêté d’avance. Les commissaires français et les commissaires impériaux furent en complet dés-

  1. Dépêche d’Olivier de La Vernade à François Ier, du 6 juillet, ibid., fol. 53. — Le cardinal d’York et le roi d’Angleterre voulaient « connoistre le tort de l’un ou de l’autre (prince) pour ayder et secourir à celluy qui seroit tenu prince d’honneur et de promesse. » Dépêche du 5 juillet, ibid., fol. 50.
  2. François Ier écrivait avec la plus grande confiance à Wolsey : « Mon bon amy,... vous garderez mon honneur et ma rayson, et en ce et en toutes aultres choses me demeurerez bon et vray amy. » Lettre olographe, Musée britannique, Calig. D. VIII, 131. — Charles-Quint, qui parlait à Henri VIII dans sa lettre du 20 juillet « de mettre une briefve et finalle résolution en la conclusion d’entre nostre saint père, vous et moy, » Musée britannique, Galba, B. VIII, fol. 76, écrivait à Wolsey : « Monsieur le cardinal, mon bon amy, pour la vraye confidence que j’ay en vous, et affin de conclure les matières secrètes, je vous prie que, le plus tost que pourrez, veuillez venir à Calais. » Lettre olographe du 20 juillet. Musée britannique. Galba, B. VI, fol. 179.
  3. Lettre du 28 juillet, State Papers, I, 23, et lettre de Wolsey au roi, du 4 août, ibid., p. 31.