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En attendant, André de Foix entra dans Pampelune le lundi 20 mai, second jour de la Pentecôte, aux acclamations des habitans. La citadelle seule, où s’était enfermé Francisco de Herrera, qui en était châtelain, et que seconda vaillamment un gentilhomme guipuscoan, Ignace de Loyola, devenu plus tard si célèbre comme fondateur de la société de Jésus, entreprit de se défendre. Les Français l’attaquèrent avec beaucoup de vigueur et la battirent en brèche. Un éclat de pierre frappa Ignace de Loyola aux deux jambes : l’une fut brisée, l’autre estropiée, et il tomba sans connaissance des créneaux dans le fossé. Le château, dont les portes furent enfoncées et les murs ouverts par le canon, se rendit. Après y avoir laissé garnison, Lesparre se porta devant Estella, qui, loin de lui résister, le reçut comme un libérateur. En moins de quinze jours, il occupa tout le territoire de ce royaume, qu’il détacha de nouveau de l’Espagne et qu’il remit sous l’obéissance d’Henri d’Albret. Mais il lui était plus facile de reprendre la Navarre que de la garder[1].


VI.

Charles-Quint était encore à Worms, où il mettait Luther au ban de l’empire pour mieux gagner Léon X, et cherchait à unir et à constituer l’Allemagne afin d’en recevoir plus d’appui en y introduisant plus d’accord, lorsqu’il apprit l’invasion du Luxembourg. Il ne se méprit pas sur le provocateur de cette attaque. L’altier empereur envoya d’abord le comte de Nassau et Franz de Sickingen, à la tête de troupes allemandes, contre Robert de La Marck. Il les chargea de châtier le serviteur inconstant et l’insolent adversaire qui, de sa petite souveraineté des Ardennes, osait s’attaquer à un empereur. Informé bientôt de l’entrée des Français en Navarre, il montra une sorte de joie et dit avec une ambition menaçante : « Dieu soit loué de ce que ce n’est pas moi qui commence la guerre, et de ce que le roi de France veut me faire plus grand que je ne suis! Car en peu de temps, ou je serai un bien pauvre empereur, ou il sera un pauvre roi de France[2]. » Il avait déjà fait signifier à François Ier, par son ambassadeur Philibert Naturelli, qu’il le considérait comme étant d’intelligence avec Robert de La Marck et avec Jean

  1. Sayas, Anales de Aragon, c. XXIX, p. 209 à 212; — Sandoval, lib. X, § V; — Du Bellay, p. 287.
  2. « Ta sij laudato, signor dio, dopoi che da me non è principiata questa guerra, et dopoi che questo re di Francia cerca farmi più grande di quel che sono, et tu sij sempre ringratiato, che m’hai donato il modo per difendermi; io espero far di brave ò ch’io sarò povero imperatore, ò lui povero re di Francia. » Lettre de Aleandro de’ Galeazzi, écrite de Bruxelles le 3 juillet 1521. — Lettere di Principi, t. Ier, p. 93, V°.