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Pour la foule, à grand bruit, l’héroïsme étincelle;
Mais, dans un humble effort, le cœur pur et constant,
Le flambeau du manoir qui luit dans la chapelle
Éclipse devant Dieu ces clartés d’un instant.

Sans faire au mal du siècle une guerre inféconde.
Où de plus fiers que toi subissent le vainqueur.
Reste armé de ce glaive impuissant sur le monde
Pour frapper sur toi-même et régner sur ton cœur.

Pourquoi rêver d’atteindre à ces gloires banales,
Et d’allumer ta lampe à leurs lointains soleils?
Tu portes dans ton cœur de plus sûres annales.
Et tes chers souvenirs sont tes meilleurs conseils.

Il t’est bon d’aspirer parfois, dans la tourmente,
L’esprit de ces grands morts et le vaste horizon;
Mais ma pensée à moi chaque jour t’alimente.
Et, comme l’air vital, elle emplit ta maison.

C’est là qu’est ta vertu, ta grandeur, ton asile;
Là, plus fort et livrant des combats glorieux.
Tu peux, libre et vainqueur dans un monde servile.
Ennoblir avec toi tes fils et tes aïeux.

Là tu peux, chaque jour montant d’une victoire.
Humble comme je fus, sans sortir du réel,
Dépasser ces sommets du globe et de l’histoire,
Que je n’ai pas connus,... mais qui sont loin du ciel!

HERMANN.


Mon front triste étincelle au feu de ta parole
Comme les noirs sapins sous ce rayon vermeil.
Chère âme d’une sainte, et ta douce auréole
A réchauffé mon cœur plus que ce beau soleil.

Non, ce n’est pas un rêve, un fantôme, une flamme
Que mon ivresse allume et qu’éteindront les vents!
Esprits qui me parlez, vous êtes bien vivans;
Je vous vois, je vous sens au toucher de mon âme !

Je dépouille à vos pieds ma faiblesse et mon deuil;
Sur l’échelle d’azur que vous avez gravie,
Vous me tendez la main,... et j’ai touché le seuil
Du monde où vous vivez la véritable vie.