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action des intérêts privés ; quand les blés surabondent, ce que le cultivateur a de mieux à faire, c’est de réduire la culture des céréales, d’étendre ses cultures fourragères et d’augmenter ses engrais, ce qui lui permet, au premier symptôme de hausse, de revenir au blé avec de plus puissans moyens de production.

Un grand projet d’assurances agricoles de la part de l’état est sans comparaison ce qui a fait le plus de bruit en 1857. Il ne s’agissait de rien moins que de garantir les cultivateurs contre tous les fléaux sans exception, grêle, mortalité du bétail, gelée, inondation, etc. Il faut que ce projet, vanté à l’envi, ait rencontré un obstacle imprévu, car on commence à douter de le voir réalisé. On se sera probablement aperçu qu’un pareil engagement serait bien lourd à porter, et qu’il imposerait aux assurés eux-mêmes des sacrifices proportionnés à l’étendue des avantages qu’ils en attendraient. On a beau s’appeler l’état, on ne peut donner d’une main que ce qu’on reçoit de l’autre. Cette difficulté se simplifiait en appelant tous les contribuables à concourir au paiement des indemnités ; mais tout le monde n’a pas également besoin de s’assurer contre la grêle ou contre l’inondation, et contraindre ceux qui ne courent qu’un faible risque à payer pour ceux qui en courent un plus grand, c’est sortir des règles de la justice. Est-ce à dire qu’il n’y ait absolument rien à faire pour les assurances agricoles, et que l’état, c’est-à-dire l’ensemble des contribuables, ne puisse en aucune façon intervenir pour secourir les plus malheureux ? Non, sans doute ; seulement il faut éviter de poser la question dans ces termes absolus qui érigent l’état en providence publique chargée de réparer tous les dommages individuels. Avant tout, laissez agir les intéressés eux-mêmes, invitez-les à s’entendre, à se concerter, à s’assurer mutuellement contre les mauvaises chances, et quand ils ont fait ce qu’ils ont pu pour se garantir par leurs propres ressources, venez à leur secours, s’il le faut, mais dans une sage mesure qui n’impose qu’un faible sacrifice à la communauté.

Depuis longtemps, on s’est habitué dans une partie du public à réclamer la confection d’un code rural. Cette œuvre difficile a été tentée sous l’empire à peu près à la même époque que les autres codes, mais elle n’a pas abouti. Depuis il a été plusieurs fois question de la reprendre ; l’immensité de la tâche a toujours fait reculer les plus hardis. Une nouvelle tentative se fait en ce moment. Deux rapports au sénat ont jeté les bases du projet ; le conseil d’état est chargé, de le préparer. Ce code serait divisé en, trois livres v le, premier traitant du régime du sol, le second du régime des eaux, et le troisième de la police rurale ; c’est à peu de chose près la division adoptée par la loi du 28 septembre 1791, qui, malgré ses lacunes est souvent encore qualifiée de code rural.