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tout naturels. Une des grandes découvertes a été, le croirait-on ? d’emmancher l’arme, et cette découverte ne s’est pas faite d’un seul coup. C’est un charme que de suivre sur les pièces de bronze les tâtonnemens de la main humaine, depuis les têtes de javelot à une seule lame, avec une queue qui se fixait dans une poignée de bois fendu, jusqu’à celles qui sont pourvues de brides, et enfin jusqu’aux têtes de javelot avec une alvéole destinée à recevoir le manche. On peut rapporter les antiquités de cette période à quatre ordres de besoins : les armes de guerre, les outils industriels, les ustensiles domestiques, les ornemens personnels. Vous avez sous les yeux, dans la collection du British Muséum, les premiers marteaux de pierre qui ont servi dans les anciennes mines de cuivre à briser les minerais. Là sont aussi les premiers moules qui ont été employés pour y couler les métaux et pour leur donner une forme. Ces objets ont été trouvés, on a lieu de le croire, sur les lieux mêmes où ils ont rendu des services, et à côté se rencontrent souvent des morceaux de cuivre qu’on se proposait de transformer. Je ne connais pas de spectacle plus imposant ni plus instructif que la vue de ces embryons de l’industrie. Les conséquences de l’introduction des métaux ont dû être incalculables : par eux, les anciens habitans des îles britanniques se sont ajouté des forces, ils ont étendu leur action sur la nature, ils ont métamorphosé le sol et introduit l’aube du bien-être dans la vie domestique. À peine l’homme s’est-il assuré le nécessaire par son travail, que le sentiment des arts s’éveille. Je ne contemple point sans plaisir les premiers objets de luxe, si grossiers qu’ils soient, des bracelets, des colliers, des ornemens de tête[1].

Au milieu de ces antiquités, il ne faut point perdre de vue le plus intéressant des monumens historiques, l’homme. Quelle était dans cette période la forme exacte du crâne breton ? Je choisirai, pour répondre à cette question, un spécimen qui me semble caractéristique. Le chemin de Londres à Bath traverse, en quittant Marlborough, une grande étendue de dunes formées par la craie. Près de Marlborough était une ville romaine ou un poste militaire. Là, dans la plaine ondulée qui s’étend au pied des dunes et à travers laquelle coule le Kennet, une petite rivière qui a donné son nom à deux villages modernes, s’élevait le fameux lieu consacré, locus consecratus, des anciens Bretons. On voyait, il y a deux siècles, un double cercle de pierre dont la plupart existaient encore en 1723 :

  1. Le sentiment de la coquetterie apparaît dès les temps les plus anciens, mais sous des formes qui indiquent un progrès. Des objets naturels, tels que des os, des écailles, des dents d’animaux, étaient d’abord portés comme ornemens ou comme amulettes. Plus tard viennent des perles de verre, d’un vert léger ou bleuâtre.