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la décomposition des végétaux houillère, est en quelque sorte emprisonné au milieu du charbon, d’où il s’échappe avec un bruit très distinct et parfois en linéamens blanchâtres auxquels il doit sans doute son nom. Il se rencontre particulièrement dans les endroits où les couches sont dérangées et dans les meilleures qualités de houille. La tension en est si considérable qu’une fois dans une mine anglaise, un bloc de charbon de plus de 11,000 kilogrammes a été violemment chassé en avant sous cette seule influence. Le dégagement du grisou est variable et paraît être en relation avec la pression atmosphérique ; il est plus abondant dans les temps d’orage. Très léger, il monte à la partie supérieure des galeries et se loge dans les angles, d’où il est difficile de le chasser. On prévoit la sollicitude constante que réclame, pour l’aérage et l’éclairage des travaux, la surveillance d’une houillère à grisou.

Un fait singulier donnera une idée de l’abondance déplorable du grisou dans les mines de Newcastle. Un ingénieur anglais eut l’idée de mettre un tube de 0m10 de diamètre en communication avec une partie, abandonnée depuis dix neuf ans, et isolée, d’une de ces houillères où chaque pore du charbon pourrait en quelque sorte être utilisé comme bec de gaz On doit estimer à 1 million de mètres cubes environ la quantité annuelle d’hydrogène carboné qui s’est jusqu’à présent dégagée par cet orifice, ce qui conduit à conclure, que le grisou doit être fortement comprimé dans les couches qui le recèlent. Le tube fut amené à quelque hauteur au-dessus du sol, et ce gigantesque bec de gaz naturel fut allumé ; il brûle ainsi jour et nuit depuis dix-neuf ans, vacillant au gré des vents. En 1846 la chaleur, développée par une explosion de grisou, acquit une telle intensité qu’elle transforma en coke, sur quelques millimètres d’épaisseur et sur une superficie considérable, les parois de charbon de la mine. Dans les seules houillères du nord de l’Angleterre, le nombre des victimes du grisou est évaluée, de la fin de 1799 au mois de mars 1841, d’après des renseignemens dignes de foi, à 1,480, et on le croit au-dessous de la vérité. Dans les mines de Durham et du Northumberland, le même nombre est, de 1756 à 1843, fixé à 1,491. Enfin les principales explosions de houillères d’une période récente de sept ans auraient fait périr 1,099ouvriers.

Parmi les causes secondaires d’accidens de mines, il en est une qui se rattache directement ainsi d’ailleurs que les explosions, à l’histoire administrative de la propriété minérale : je veux parler des inondations. C’est à la suite de deux terribles catastrophes survenues dans la province de Liège que fut promulgué le décret impérial du 3 janvier 1813 sur la police souterraine, le 10 janvier 1812, une explosion de grisou avait tué 78 mineurs ; le 28 février,