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SOUVENIRS
D'UN AMIRAL

PREMIERE PARTIE
LA JEUNESSE D'UN HOMME DE MER

IV.
LA FIN D'UNE CAMPAGNE MARITIME.



I

Le moment semblait venu de reprendre le chemin de la France ; mais si l’on réfléchit à la situation politique où se trouvait en 1793 notre malheureux pays, on ne s’étonnera point que de douloureuses préoccupations aient disputé nos âmes à la joie du retour. Nous n’avions, il est vrai, rien à redouter en apparence de la terrible conflagration qui, au moment même de notre départ, menaçait déjà l’Europe. Des lettres de neutralité envoyées par tous les gouvernemens mettaient la Truite et la Durance à l’abri des chances d’une guerre générale. Ce sauf-conduit formel nous eût-il manqué, nous trouvions un autre gage de sécurité dans le généreux exemple donné en 1778 par la France et les États-Unis. Les croiseurs des deux pays avaient à cette époque reçu l’ordre de respecter les bâtimens qui, sous les ordres de Cook, venaient d’explorer l’Océan Pacifique. Comme la Résolution et la Discovery, la Truite et la Durance étaient