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répond M. Fryxell ; les deux réformateurs et leur roi Gustave Wasa étaient inspirés par des motifs plus nobles. Ils étaient tous les trois dévoués de cœur et d’âme à la religion du Christ. Ils avaient beau considérer leur doctrine comme le faîte du christianisme ; ils savaient que cette doctrine, cime majestueuse de l’arbre, était portée par le tronc, et que si ce tronc était coupé à la base, c’en était fait de la couronne. « L’évangélisme, disaient-ils, s’est dégagé du catholicisme comme la jeunesse se dégage des liens de l’enfance ; séparé de ses origines, privé de son fondement historique, il ne serait plus qu’une ombre. » Voilà comment, à leurs yeux, la réprobation absolue du catholicisme serait fatale au christianisme lui-même. « Nous croyons du moins, ajoute M. Fryxell, que si les réformateurs suédois et leur école ont jugé sans amertume la religion catholique, la pensée que nous venons de résumer ici a contribué pour une grande part à leur modération. »

Ainsi, pendant cette première période, les historiens ne jugent pas les siècles catholiques de la Suède avec les passions de la lutte. On peut dire en effet que la lutte n’avait pas commencé ; Gustave Wasa ne voulait pas avouer aux populations des campagnes que le protestantisme était une forme nouvelle de la religion du Christ. Il fallut bien cependant que la vérité se fît jour. Le protestantisme suédois, tout en conservant la plupart des institutions catholiques, était obligé de les approprier à ses doctrines. Là-dessus des dissentimens éclatèrent, et bientôt ce fut une guerre religieuse. Le roi Jean III se piquait de théologie, il voulut décider lui-même certaines questions liturgiques ; à la fois indécis dans ses principes et intraitable pour ceux qui ne pensaient pas comme lui, il donna par ses écrits et par ses actes le signal de la violence. Des théologiens lui répondirent. On l’accusa de tendances catholiques, et la lutte s’envenima tous les jours. La modération des premiers réformateurs était devenue impossible. Les partis se constituaient d’une manière distincte ; protestans et catholiques, confondus jusque-là, se trouvaient en présence. On sait quelle fut l’issue de ces débats le protestantisme devait triompher. La guerre de trente ans, la part glorieuse qu’y prit Gustave-Adolphe, le sang des Suédois glorieusement versé pour la liberté religieuse, toutes ces causes implantèrent le protestantisme en Suède, et ceux-là même qui auraient hésité cent ans plus tôt à changer de religion étaient gagnés désormais au christianisme du XVIe siècle.

Les historiens de cette période sont réunis par M. Fryxell sous le nom d’école symbolique, parce que la question des symboles, ou, en d’autres termes, de la liturgie religieuse, fut la question principale de ce temps, et qu’elle amena l’introduction définitive du luthéranisme dans la péninsule Scandinave. Ce fut surtout l’histoire contemporaine qui occupa ces écrivains, et l’on comprend que d’une part la lutte de Gustave-Adolphe contre les Wallenstein et les Tilly, de l’autre la polémique suscitée parle changement de la liturgie, aient entretenu chez eux un esprit de partialité ardente. Les historiens politiques, comme Tegel, Videkindi, Boeder, Chemnitz,