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d’infaillibilité qu’ils s’accordent, l’autorité dont ils sont armés par la loi, le silence qu’ils savent établir autour d’eux, tout leur assure la paisible jouissance d’une position commode. Que des chrétiens trop exigeans ne viennent pas troubler ce silence, que de pieux enfans de Luther ne parlent pas trop haut de l’Évangile, sinon évêques et prieurs vont s’écrier que l’invasion catholique est imminente. À chaque progrès de la vie religieuse au sein du protestantisme suédois, on peut affirmer que l’église officielle proférera des injures plus violentes contre le catholicisme. Or ces progrès vont croissant depuis quelques années ; comment s’étonner des violences de langage auxquelles se sont livrés les orateurs de l’église dans la discussion du projet royal ? Sans la crainte qu’inspire l’agitation religieuse, l’agitation toute protestante des lecteurs et d’autres communautés semblables, l’évêque de Westeras eût-il pu s’oublier jusqu’à dire qu’un catholique n’est pas un chrétien, que le catholique est animé du même esprit que le mormon, et que tous les deux doivent être mis hors la loi ?

Les emportemens de cette discussion ont rappelé à tous les esprits libéraux le langage si différent tenu, il y a une dizaine d’années, par des membres éminens de l’église suédoise. Ce rapprochement est instructif ; aux cris haineux de l’évêque Fahlcranz, opposons l’évangélique parole du pasteur Fryxell.

Les lois de l’église suédoise exigent que, tous les trois ans au moins, chaque évêque convoque le clergé de son diocèse à des conférences solennelles. Les jeunes ecclésiastiques y soutiennent des thèses avant de recevoir leurs pouvoirs définitifs, et des orateurs parlant au nom de l’évêque y traitent des questions de théologie et d’histoire. Une de ces conférences, tenue à Carlstad, dans le diocèse du Wermland, a laissé des souvenirs que l’histoire littéraire, aussi bien que l’histoire religieuse, ne doit pas laisser s’éteindre ; dans la séance du 15 juin 1847, un pasteur qui occupe un rang distingué parmi les écrivains de son pays, M. Fryxell, entreprit d’y réfuter les jugemens iniques portés par les historiens suédois sur la période catholique des pays Scandinaves. Cette injustice s’expliquait autrefois ; il n’est pas donné à l’homme d’être juste, en matière religieuse, pour des ennemis qu’il est forcé de combattre ; mais la lutte n’est-elle pas finie ? N’y a-t-il pas aujourd’hui d’autres dangers que les dissidences d’église ? Ceux qui se combattaient naguère ne doivent-ils pas désormais s’unir contre les ennemis communs, contre les ennemis de toutes les doctrines chrétiennes ou spiritualistes ? Telle est l’inspiration qui animait M. Fryxell lorsqu’il écrivit son discours et le publia sous ce titre : Raisons de l’injustice historique avec laquelle l’époque catholique a été traitée en Suède. Ce discours est un exposé des diverses écoles historiques de la Suède en même temps qu’il renferme les considérations de l’ordre le plus élevé sur les intérêts politiques et religieux de la société européenne. « Mes frères, disait M. Fryxell, nous avons eu à lutter longtemps contre l’église catholique. Aujourd’hui le combat est fini, la victoire