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ont enfin résolu le problème légué à la postérité par le génie de Beethoven. Grâce à MM. Maurin et Chevillard, ses derniers quatuors sont compris maintenant. On peut discuter en connaissance de cause le mérite de ces œuvres, qui sont de vrais monstres dans le sens antique de ce mot, c’est-à-dire des merveilles de beautés et d’étranges erreurs. — Une autre société non moins intéressante est celle fondée, il y a deux ans, par MM. Armingaud et Léon Jacquard pour l’exécution des œuvres de Mendelssohn, sans exclusion des autres grands maîtres de l’Allemagne. Elle a donné cette année, dans les salons de la maison Érard, six séances qui ont été suivies par une portion choisie du public parisien. A la première séance, qui s’est donnée le 28 janvier, on a exécuté le quatuor en ré de Mendelssohn, dont le menuetto nous a paru la partie saillante; la sonate pour piano (opéra 57e) de Beethoven, dont le finale, d’une si grande beauté et d’une difficulté prodigieuse, a été rendu avec énergie par M. Lubeck, talent un peu fruste, mais incontestable. On a terminé par l’ottetto de Mendelssohn, morceau distingué, surtout le scherzo, qui relève bien un peu du style de Beethoven. A la seconde soirée, nous avons entendu le deuxième trio en sol majeur, pour piano, violon et violoncelle, de Mozart. Mme Massart a rendu avec goût et délicatesse la partie de piano de ce délicieux chef-d’œuvre. Puis est venu le onzième quatuor de Beethoven, dont le premier morceau a un caractère étrange, brusque et pathétique comme toute la composition. M. Léon Jacquard et Mme Massart ont exécuté ensuite la sonate en si bémol, pour piano et violoncelle, de Mendelssohn. M. Jacquard est un artiste de talent : il a du sentiment, une bonne qualité de son et une grande justesse, qualité précieuse sur le violoncelle. A la troisième séance, on a exécuté admirablement le quatuor en fa de Mozart, celui en mi majeur de Mendelssohn, qui est un chef-d’œuvre dans le genre compliqué et très concerté de la troisième manière de Beethoven. On a terminé par un autre quatuor du même auteur, celui en mi mineur (opéra 44e), dont le scherzo et l’andante sont les parties vives et remarquables. La quatrième séance a été particulièrement intéressante par l’exécution du soixante-quinzième quatuor de Haydn, dont l’adagio est aussi beau que les plus belles inspirations de Beethoven. A la cinquième séance, le public a vivement applaudi le deuxième quatuor en la de Mendelssohn, dont le fragment, intitulé Intermezzo, est l’une des plus heureuses inspirations de ce compositeur éminent. Certes MM. Armingaud et Léon Jacquard méritent qu’on les encourage dans la mission qu’ils se sont donnée de répandre les œuvres du plus jeune des grands compositeurs qu’a produits la terre classique de la musique instrumentale.

M. Charles Lebouc, violoncelliste agréable, a continué aussi cette année les séances de musique classique qu’il a instituées depuis trois ans, et qui sont suivies par un public zélé. N’oublions pas de mentionner encore les matinées de M. Félicien David, où il a fait entendre plusieurs de ses jolies compositions vocales et instrumentales.

Un homme de goût, un amateur distingué, qui lui-même cultive la musique avec succès, M. Le comte de Stainlein, a eu l’heureuse pensée de donner dans les salons de M. Pleyel quatre séances de musique de chambre, dont les profits ont été consacrés à des œuvres de bienfaisance. Secondé par