Page:Revue des Deux Mondes - 1857 - tome 9.djvu/63

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de vérités qui concernent les choses divines. » Et ces conciles assez obscurs que nos provinces des Gaules ont tenus il y a quelques années ont répété, — l’un, celui de Rennes, qu’il fallait se garder de ce fallacieux système de philosophie venu de ces hommes qui aiment si fort l’autorité que, si elle ne leur parle, ils ne peuvent jouir d’aucune certitude, et qui, élevant la foi et abaissant la raison outre mesure, sapent du même coup les fondemens de la foi et de la raison; — l’autre, le concile d’Amiens, qu’en attaquant le rationalisme, on devait prendre garde de réduire à une sorte d’impuissance l’infirmité de la raison humaine, que l’homme peut par elle concevoir et démontrer plusieurs vérités telles que l’existence de Dieu, l’immortalité de l’âme, la distinction du bien et du mal, et qu’il est faux qu’il ne puisse admettre naturellement ces vérités qu’autant qu’il croit d’abord à la révélation divine par un acte de foi. C’est la constante doctrine, dit le même concile, des écoles catholiques. Enfin le souverain pontife a tenu un semblable langage. La cour de Rome en effet, dans tout ce qui ne touche pas trop directement son autorité, incline à la modération. Elle est politique, c’est dire qu’elle est sensée. Or maintenant ses droits sont amplement reconnus. Elle a obtenu et elle obtient chaque jour des églises nationales beaucoup plus que depuis des siècles elle n’aurait osé espérer ni prétendre. Cette victoire, qui assurément n’est pas sans dangers et que nous sommes loin de célébrer, a cet avantage de porter un vainqueur naturellement doux et prudent à prouver sa supériorité par sa sagesse. Le pape n’aspire qu’à dominer dans un royaume de paix, et les doctrines violentes, les témérités d’esprit et de raisonnement qui cherchent à lui plaire, ne sont pas plus dans ses goûts que dans ses intérêts. Lisez les encycliques sur les questions qui intéressent la philosophie, écartez une phraséologie malheureuse, les gémissemens affectés, les imputations gratuites, tout le fâcheux style de la chancellerie romaine, et souvent vous trouverez au fond les droits de la raison reconnus à côté de ceux de la foi. Cela était vrai même avant les quatre propositions mémorables qui ont, l’année dernière, condamné en termes formels le traditionalisme. Le père Chastel a pu les pressentir, mais il aura l’honneur de ne les avoir pas attendues pour publier son ouvrage.


IV.

En rendant un sincère hommage à ces preuves d’un zèle éclairé pour la raison et pour la paix, notre franchise ne serait pas entière si nous paraissions tout approuver sans distinction, et souscrire à tout ce que nous ne relevons pas. Même dans ce livre, dont l’esprit est excellent, tout ne nous satisfait pas au même degré, et nous pour-