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prême de la nature pour chasser au dehors le poison miasmatique par une poussée exanthémateuse ; il faut ne saigner que si le sujet est très fort, s’il y a menace d’apoplexie cérébrale, préférer le plus souvent à une saignée générale, remède dont on doit être fort sobre, quelques sangsues derrière les oreilles ou quelques ventouses entre les épaules, recourir aux mêmes moyens quand la petitesse du pouls trahit l’oppression des forces vitales, lesquelles se relèvent après une déplétion sanguine modérée. Quand dès le début, comme dans le typhus de Crimée, il y a des paroxysmes rémittens, il est bon de les couper par quelques doses de sulfate de quinine. Ainsi est rétablie la continuité de la fièvre, qui tombe alors d’elle-même après quelques jours, quand elle n’est pas entretenue par une congestion organique déterminée par les premiers accès. Cette complication a fréquemment lieu quand on n’a pas soin d’anéantir tout d’abord les paroxysmes, c’est-à-dire les redoublemens de fièvre. Au début du typhus, un éméto-cathartique est bienfaisant, surtout quand il existe quelque embarras gastro-intestinal. On donne des boissons mucilagineuses ou acidulées et même de l’eau vineuse. Dans la période nerveuse, on a recours aux remèdes usités contre l’ataxie et l’adynamie. Dans ce dernier cas, les toniques tels que les vins de Malaga et de Porto hâtent beaucoup la guérison.

Tel est l’exposé rapide du traitement qui a donné les résultats les plus avantageux à l’armée d’Orient, et auquel se sont ralliés les praticiens les plus expérimentés, tels que M. Cazalas, qui a préconisé l’un des premiers le sulfate de quinine pour régulariser la période inflammatoire et la débarrasser de l’élément palustre, dont l’influence sur les malades de Crimée a été très marquée. En résumé, le typhus a révélé sa nature propre par son caractère infectieux, sa transmissibilité facile, la rapidité de sa marche, l’ensemble de ses symptômes et l’absence de lésions anatomiques.

On peut chercher encore des éclaircissemens sur les affections typhiques dans la comparaison du typhus de Crimée avec les épidémies du même genre qui ont affligé les populations et les armées à d’autres époques. Sans doute il n’y a pas ressemblance absolue, car les manifestations épidémiques d’une même maladie varient, comme on sait, suivant les temps, les lieux et les peuples ; mais on a retrouvé dans le typhus de Crimée la putridité et la destruction rapide des forces signalées dans le typhus de Mayence, le délire, la stupeur, l’exanthème rosé décrits par Hildenbrand, etc. Si le typhus de Crimée n’a pas été très grave, comparé aux désastreuses épidémies de Mayence et de Torgau, nous l’expliquons par les conditions dans lesquelles s’est trouvée notre armée : une hygiène meilleure, la rapidité des soins donnés aux malades, la facilité et le grand nombre des