Page:Revue des Deux Mondes - 1857 - tome 9.djvu/611

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

spéciale, qu’on a appelée intermittente pour la distinguer de la fièvre continue, déterminée par d’autres maladies, est caractérisée par trois périodes bien marquées : le frisson d’abord, puis la chaleur, enfin la sueur. Cependant elle s’est rarement montrée en Crimée sous ce type pur et franc. Le plus ordinairement les accès étaient incomplets, ou bien la chaleur débutait d’emblée sans frisson initial et sans être suivie de transpiration. Cette maladie semblait n’être qu’une complication des fièvres continues. De même il était assez rare que les affections continues parcourussent toutes leurs phases sans se compliquer de phénomènes intermittens. Les maladies étaient donc généralement rémittentes. On appelle ainsi les maladies composées d’un élément fébrile continu et d’un élément fébrile intermittent. Les accès de fièvre rémittente étaient rarement complets. Le moindre accès intermittent déterminait des accidens rapidement mortels quand il survenait pendant le cours d’une fièvre continue, alors que l’économie avait déjà reçu de graves atteintes par les privations, la diarrhée, le scorbut ou toute autre maladie chronique. Dans ces affections complexes, quand l’intermittence n’était que secondaire, le premier soin était d’attaquer l’élément fébrile continu par des vomitifs, s’il était représenté par un embarras gastrique, par la saignée, s’il y avait pléthore, etc. En même temps, dès les premiers accès intermittens ou rémittens, il fallait se hâter d’en prévenir le retour par deux ou trois doses de sulfate de quinine à 1 ou 2 grammes. Les accès de fièvre intermittente pernicieuse d’emblée sont déterminés par une intoxication paludéenne profonde. Dans la Dobrutcha, on en a observé un certain nombre; ils ont été rares en Crimée.

Le nombre toujours croissant des fiévreux rendit encore insuffisans les établissemens hospitaliers de Constantinople. Le sultan offrit avec une généreuse spontanéité un palais à peine terminé qui portait son nom, et qui devint alors l’hôpital de Péra. L’architecture de ce palais, dans le style oriental, est fort belle et d’une grande solidité; chaque angle est marqué par un pavillon que surélève un nouvel étage. Un minaret central, orné de plusieurs rangées de galeries découpées à jour, s’élance avec vigueur dans un ciel d’azur, et prête à ce monument quelque chose d’aérien sans ôter à l’ensemble son caractère majestueux. Le rez-de-chaussée, élevé de deux mètres au-dessus du sol, et le premier étage présentent d’immenses et larges galeries éclairées du côté de la cour par des travées cintrées dont les arceaux retombent sur de hauts et élégans piliers; ces ouvertures sont fermées par de grandes fenêtres. Les galeries auraient dû servir exclusivement de promenoir pour les jours de mauvais temps. Il est regrettable qu’on ait été dans la nécessité d’y installer des lits, mais il fallut tirer parti de toutes les ressources pour loger 2,000