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lumière incertaine d’un mince croissant de lune, et je revins à bord, fort prévenu en faveur de la nouvelle ville. Le lendemain, par malheur, l’éclat accusateur du soleil me montra la stérilité du sol et les droits qu’avait la ville à porter le nom de Pointe-de-Sable.

Punta-Arenas est le principal port de l’état de Costa-Rica. C’est de toutes ces côtes le point le plus animé. Peut-être même l’activité serait-elle encore plus grande, si le gouvernement n’avait, il y a quelques années, sans motifs bien valables, transféré le port au lieu voisin, dit la Caldera, pour le transporter de nouveau à Punta-Arenas. La prospérité de Punta-Arenas ne date guère que d’une quinzaine d’années, mais depuis lors elle s’est incessamment accrue. La rade est bonne, la ville, construite sur une langue de sable de deux lieues de long, qui ferme le port intérieur du côté du large, s’y prolonge en une rue unique sur toute l’étendue de la pointe, laissant apercevoir d’un côté la rade et les navires de long cours, de l’autre le port et de nombreux caboteurs. Les maisons sont en bois, spacieuses et bien construites; il s’en élève beaucoup de nouvelles, et une suite de magasins approvisionnés, quelques-uns presque élégans, indiquent des ressources que l’on serait loin de supposer d’abord. J’ai vu qu’on y établissait une scierie à vapeur, qui devait fonctionner sur une grande échelle. Sur la plage, à quelques pas l’un de l’autre, sont les deux seuls édifices publics que possède la ville : une église, en bois comme le reste, et un phare, luxe auquel sont peu habitués les navigateurs des mers du sud. A côté, quelques petits canons dépareillés, hors d’état de faire feu, sont mis en batterie, on ne sait pourquoi. En somme, le port n’a guère qu’un mouvement de 20,000 tonneaux, tant en exportations qu’en importations, et la faiblesse numérique de la population l’empêchera longtemps d’atteindre un grand développement, malgré un climat heureux et un sage gouvernement. C’est du reste le seul endroit de cette côte où un navire puisse trouver des ressources en vivres et en matériel.

De Punta-Arenas à la baie d’Amapala, située plus au nord, on rencontre dans le golfe de Papagayo le port de San-Juan del Sur, dont l’importance n’est que momentanée; ce port sert de débouché à la ligne actuelle qui traverse l’isthme par le Nicaragua. Malgré la

précaution singulière qu’a prise le gouvernement de Costa-Rica d’y 

décréter une ville, rien de ce genre ne s’y est encore élevé, et tôt ou tard on abandonnera ce port sans ressources, maladroitement placé sur la plage la plus inhospitalière de l’Amérique centrale. Le golfe de Papagayo est renommé pour la violence des vents du nord, qui y rendent la navigation difficile et même parfois dangereuse.

Les deux points indiqués par la nature des lieux comme têtes du canal qu’on songe à creuser dans le Nicaragua seraient Realejo et Amapala. Le premier possède une rade d’une parfaite sécurité. Au-