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monde, et nulle secousse n’y fut ressentie pendant cette désastreuse nuit de Pâques, où la ville de San-Salvador, distante seulement de vingt lieues, était détruite de fond en comble. L’activité constante de ce volcan si bien réglé semble garantir, par l’issue qu’il donne sans cesse aux humeurs souterraines, la tranquillité du pays.

Sur l’emplacement occupé aujourd’hui par l’Izalco, se trouvait encore en 1768 une belle et riche hacienda (ferme), où l’on élevait de nombreux troupeaux. De temps en temps les pâtres avaient entendu sous leurs pieds des bruits menaçans; ils avaient parfois senti le sol s’agiter d’une manière étrange. Vers la fin de l’année, ces avertissemens sinistres devinrent plus nombreux, et le 23 février 1769 la terre s’entr’ouvrit à moins d’un quart de lieue de la maison de l’hacienda. D’abord des cailloux et de la poussière, irrégulièrement et faiblement lancés ou plutôt exhalés, sortirent seuls de cet orifice; peu à peu vint la fumée, puis les flammes; le cratère s’élargit, et le volcan se forma lui-même de sa lave, grandissant sur le flanc de la montagne, jusqu’à ce qu’il atteignît sa hauteur actuelle, 1,500 mètres au-dessus de la plaine. Les explosions de l’Izalco ne sont pas à intervalles aussi égaux qu’a bien voulu le dire un voyageur américain, qui les fait de seize minutes quinze secondes, ni plus ni moins. Quelquefois il reste une heure et plus sans donner signe de vie. Toutefois les détonations sont espacées le plus souvent de dix à quinze minutes. Alors on entend comme une puissante décharge d’artillerie; quelques secondes après s’élève une colonne de fumée, puis un nuage de cendres et une pluie de pierres lancées dans toutes les directions. La lave n’est jamais liquide, elle se produit sous forme de poussière grise et ténue ou de blocs de même couleur, poreux, quoique peu friables et d’une densité assez faible. Le sol, sauf de rares exceptions, ne s’ébranle qu’insensiblement dans les environs et même sur le flanc du volcan.

Quelque point que l’on gravisse sur le versant occidental des Cordillères, on aperçoit toujours l’Océan-Pacifique. La mer, c’est le théâtre où doit se développer l’activité, la destinée commerciale du pays. Là est la route qui mène en Asie, en Australie, vastes débouchés offerts à l’exportation. Les ports sur le Pacifique ont donc une très grande importance. Je les visitai successivement en remontant du sud au nord, étudiant les conditions physiques qui permettent d’en présager la future prospérité.

Comparés aux ports de l’Amérique centrale situés sur l’Atlantique, les ports des côtes occidentales sont d’une incontestable supériorité. Yzabal, Belise, San-Juan-de-Nicaragua, sur l’Atlantique, sont incommodes et d’accès difficile. Moins rapprochées des Cordillères, les côtes orientales ont une fâcheuse insalubrité, due en grande partie à cet éloignement, et par suite à la formation de terrains d’alluvion