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tempérée et froide) sont étagées pour ainsi dire, et l’on pourrait, en remontant du rivage aux majestueux sommets qui bornent l’horizon, voir successivement dans le moindre espace possible les diverses productions des diverses températures. Ce qui distingue surtout le pays, c’est le caractère essentiellement volcanique du sol : depuis le golfe de Fonseca jusqu’à San-José de Guatemala, on voit, — spectacle unique au monde, — une suite non interrompue de hauts volcans, dont plusieurs sont toujours en ébullition; un peu plus au sud, la chaîne des Marabios en a quatorze sur une longueur de trente lieues. Malheureusement aucun savant n’a fait de ces contrées une étude spécialement géologique. M. de Humboldt, dont les recherches n’ont pas dépassé le Mexique, a exprimé plusieurs fois le regret de ne pas les avoir poussées jusque dans l’Amérique centrale. Il aurait retrouvé là tous les phénomènes volcaniques, solfatares, sources d’eau chaude, lacs placés sur le haut des montagnes, enfin les tremblemens de terre et les éruptions, dont les ravages combinés ont à plusieurs reprises détruit des villes entières : ainsi en 1854 la capitale du San-Salvador, en 1841 Cartago, dans l’état de Costa-Rica, et plusieurs fois, dans le siècle dernier, l’ancienne ville de Guatemala, dite la Antigua.

Les principaux volcans de l’Amérique centrale sont la Coseguina, dont le cratère, après la désastreuse éruption du 20 au 24 janvier 1835, reparut effondré, comme affaissé sur lui-même, diminué de mille mètres, c’est-à-dire de la moitié environ de sa hauteur, et le Pacaya, dans lequel l’imagination des conquérans voyait un gigantesque creuset d’or et d’argent en éternelle fusion. Le plus curieux est sans contredit l’Izalco, le seul avec le Jorullo qui se soit produit au Nouveau-Monde depuis la conquête, et le seul absolument de notre globe qui soit en éruption permanente depuis sa formation.

L’Izalco se dresse comme un phare au-dessus de Sonsonate. A côté de lui se trouve le village d’Izalco, situé sur un de ces plateaux larges et élevés où les Indiens établissaient de préférence leurs positions. Ce village est un des plus anciens centres de population indienne du pays, comme le montre l’étendue de terre cultivée qui l’environne; pendant longtemps, son importance rivalisa avec celle de Sonsonate, qu’il surpassait même en habitans. D’après Juarros, l’historien espagnol de la principauté de Guatemala, on y trouvait encore au commencement du siècle 6,000 âmes, aujourd’hui réduites à moins de 2,000. Peut-être la présence de ce fâcheux voisin a-t-elle contribué à la dépopulation du village. Cependant jusqu’ici le courant de lave s’est écoulé dans une direction opposée, et la continuité des éruptions en a modéré la violence. Dans le grand nombre de tremblemens de terre et d’éruptions qui désolèrent l’Amérique centrale en 1854, l’Izalco continua à se comporter le plus régulièrement du