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et l’on peut encore aujourd’hui retrouver dans les journaux anglais le souvenir des mésaventures d’un de ces imprudens qui, aux avant-dernières élections, s’était fait bafouer par lord Palmerston, en s’exposant à ses plaisantes reparties.

En dépit de toutes ces apparences de jovialité dont il ne faut pas tenir trop grand compte, la journée des hustings n’est pas une vaine représentation; elle entre dans le système des institutions électorales du pays, et quand elle ne décide pas l’élection, elle est au moins destinée à la préparer. Elle se termine par un appel fait à toute l’assemblée du peuple pour la nomination des candidats, et c’est la levée des mains qui doit faire connaître en leur faveur l’opinion publique. S’il n’y a pas à décider entre différens compétiteurs, il n’y a lieu qu’à une acclamation générale. Dans le cas contraire, l’assemblée est consultée successivement en faveur de chaque concurrent; tout assistant, fùt-il un étranger, peut devenir pour un moment électeur; ceux mêmes qui sont restés à cheval autour de l’enceinte réservée peuvent prendre part au vote, et ajoutent par là à la singularité du spectacle. Sur les hustings, devant les hustings, à l’appel du nom de tel ou tel candidat, les mains se lèvent ou s’abaissent tour à tour : le shériff ou l’officier préposé à l’élection doit aussitôt décider à première vue en faveur de quel candidat la foule s’est prononcée, et il annonce sa nomination au milieu des hourras de ses partisans. Toutefois cette nomination n’est pas définitive, et chacun des amis du candidat opposé ou le candidat opposé lui-même peut y mettre son veto en venant demander immédiatement le poll, c’est-à-dire l’enregistrement du vote des citoyens qui sont électeurs. C’est là l’épreuve décisive qui peut faire du vainqueur d’un jour le vaincu du lendemain. La nomination populaire, frappée d’appel, peut être infirmée par le corps électoral; elle n’en garde pas moins la valeur d’une épreuve préparatoire. Le peuple tout entier n’a jugé, il est vrai, qu’en première instance; mais il a été réellement consulté.

Le poll lui-même, ou l’élection proprement dite, qui est destiné à faire réviser, sur la requête de la partie intéressée, par le corps électoral, c’est-à-dire par l’élite des citoyens, le suffrage de la multitude, donne encore certaines garanties à la partie de la nation qui n’est pas appelée à y prendre part. Il est public, et par là il assure à ceux qui n’en usent pas un droit de contrôle sur ceux qui votent. Les électeurs, comme les candidats eux-mêmes, sont ainsi rendus responsables envers toute la nation.

Le lendemain de la nomination dans les bourgs et dans les villes, et dans les comtés le troisième jour qui la suit, si ce n’est pas un dimanche, est maintenant l’époque fixée pour le poll. C’est à un seul jour, et pour les comtés d’Irlande à deux jours, que les derniers actes