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viendrait l’alliance politique? Des influences étrangères, intéressées à affaiblir ou à ruiner l’union scandinave, ne sauraient-elles pas mettre à profit les premiers dissentimens, exciter de part et d’autre la jalousie et le mauvais vouloir, et persuader en dernier lieu aux souverains qu’il y a désaccord entre leurs intérêts dynastiques et les intérêts nationaux?

D’abord on peut répondre que l’union des peuples commandera infailliblement celle des rois. Cela ne suffit-il point, M. Ploug n’hésite pas à prononcer le mot qui forme le nœud de son discours et en même temps, on peut le dire, le nœud du scandinavisme : il invoque, puisqu’il le faut, « l’unité dynastique. » Il n’espère pas, en présence des obstacles que crée la légalité, que cette unité soit obtenue prochainement; mais il regrette qu’en 1745, quand les Dalécarliens marchaient sur Stockholm en demandant le roi de Danemark pour successeur à la couronne suédoise, — en 1810, quand Napoléon recommandait Frédéric VI à l’élection suédoise, — en 1848 enfin on n’ait pas saisi l’occasion de la préparer ou de la mettre en pratique sans violer aucun serment ni aucun traité. « On me dira, continue-t-il en faisant entrer de plus en plus dans son discours les réalités de la politique actuelle : Comment venez-vous parler d’une union intime entre les états du Nord, vous Danois, vous, dont le pays vient d’accepter nous ne savons quelle monstrueuse union avec un état de la confédération germanique? — Je réponds : Je ne suis pas ici pour accuser ou défendre la politique de ma patrie. Je dirai seulement, pour ceux qui ne connaissent pas notre récente histoire, que, lorsque le choix nous a été offert, nous n’étions déjà plus libres, et que, pour ma part, je regarde la condition présente du Danemark comme une épreuve envoyée par Dieu pour resserrer et affermir notre nationalité. De cette épreuve, j’en ai la ferme espérance, mon pays sortira plus fort, plus énergique, plus digne enfin qu’il n’est peut-être aujourd’hui d’entrer dans la communauté scandinave. Le Helstat sera pour nous ce que l’union de Calmar a été pour la Suède; seulement il ne durera pas aussi long-temps sans doute. Le Helstat n’est pas un obstacle sérieux à l’union du Nord. Cette union est indispensable aux trois royaumes pour protéger au dedans leur liberté, au dehors leur indépendance, pour donner aux nations du Nord la place qu’elles méritent d’occuper dans l’histoire, et elle ne sera une vérité qu’après qu’elle aura été sanctionnée par une étroite alliance politique. »

Voilà ce qui s’appelle entrer dans le vif de la question, et l’on voit que les fêtes scandinaves de l’an dernier ne sont pas restées étrangères à toute idée politique et pratique. Par la voix du publiciste et du député danois, le Danemark lui-même y a fait intervenir la pensée des dangers qui le menacent de nouveau; ces dangers, qui ne peuvent