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procédés, d’accroître leur production, longtemps stationnaire, toujours insuffisante. Le Russe est loin de connaître encore les mille usages du fer; il s’en passe chaque fois qu’il peut le remplacer par le bois. Cependant la production totale de la fonte et du fer en barre, qui, en 1782, n’était que de 80 millions de kilogrammes, équivaut actuellement à 320,000 tonnes; on exporte en Angleterre des fers propres à la fabrication de l’acier, et en Amérique de grosses tôles fort recherchées. C’est la province de Perm qui représente cette industrie avec le plus d’honneur. Sur les 85 usines appartenant à des particuliers, l’état en a une trentaine, la province de Perm en compte 47; elle contient en outre les mines de cuivre les plus productives. Le rendement annuel en cuivre est de 5 à 6 millions de kilogrammes, dont plus d’un cinquième s’exporte. Nous ne ferons que mentionner les manufactures d’armes, de faux, de faucilles, de coutellerie, de quincaillerie, d’ustensiles en cuivre, etc., qui font la célébrité de Koursk, d’Orel et de Toula, villes situées sur la ligne de Moscou à Théodosie, et nous ne consignerons plus qu’un fait. Vers 1824, l’importation des machines pour les ateliers russes était évaluée à 200,000 fr.; la moyenne annuelle est maintenant de 12 à 13 millions, quoiqu’on en construise en Russie même. Pétersbourg par exemple a des établissemens pour la construction des machines; à Nijni-Novgorod, les ateliers de l’une des compagnies du Volga ont ajouté sept steamers à la flottille du fleuve et livré en quelques années six machines à vapeur d’une force totale de 700 chevaux. Nul doute que la ligne de Moscou à Nijni-Novgorod ne hâte le développement moral et industriel de cette région de l’est, intéressante à plus d’un titre; les villes s’y créent sans bruit. Perm, récemment bâtie sur la Kama, a déjà 12,000 habitans; la population augmente sur tous les points; le sol suffit à la nourrir; les terres du gouvernement d’Orenbourg se défrichent; les émigrations de l’intérieur en prennent le chemin, et bientôt la solitude et l’inculture disparaîtront de cette lisière de l’Europe, d’où partent les caravanes de l’Asie, d’où partiront plus tard des colons volontaires pour la Sibérie.

C’est l’activité industrielle, on le voit, qui distingue surtout la région supérieure de la zone centrale; quant à la région inférieure, agricole par excellence, elle porte le nom significatif de terre noire. Sa surface est formée d’une couche épaisse d’humus d’une fécondité inépuisable. Elle s’étend de la Podolie, dans l’ouest, au gouvernement d’Orenbourg, dans l’est, et comprend 95 millions d’hectares. Cette région privilégiée a sa page dans l’histoire. Lorsque les Tatars dominaient sur les bords de la Mer-Noire, en Crimée, sur le cours inférieur du Volga, les cultivateurs y étaient exposés à des incursions perpétuelles; ils se retirèrent dans les provinces septentrio-