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coton, dont 2 millions seulement de coton filé. En 1834,la consommation de la France ne dépassait pas 36 millions de kilogrammes de coton brut. Sur les 224 millions de francs qui représentent la valeur des produits de l’industrie cotonnière russe, 100 millions figurent au compte des provinces centrales de Kostroma, Vladimir et Moscou, et une extension rapide est promise à cette industrie, parce qu’en outre de l’exportation chez les nations asiatiques, les étoffes de coton envahissent les classes inférieures; l’indienne pénètre dans les villages de l’empire. Le reproche commun qui pourrait être adressé aux producteurs russes, c’est qu’ils n’ont pas encore obtenu le bon marché; mais, parmi les causes de cherté de leurs tissus, il faut noter le transport dispendieux des matières premières venant de l’intérieur ou du dehors et la circulation difficile des produits manufacturés.

C’est encore à la zone centrale que se rattache l’industrie métallurgique. Sans doute les principales usines ne sont pas celles des provinces de Kalouga, d’Orel, de Penza, de Riazan, de Vladimir, mais c’est à Nijni-Novgorod que sont expédiés par la Kama, qui les transmet au Volga, les produits des usines situées le long de la chaîne de l’Oural. Cette région isolée réunit presque toutes les richesses minérales de la Russie, fer, cuivre, platine, or, etc. Ces richesses se retrouvent avec la même abondance de l’autre côté de l’Oural, dans la Sibérie, qui n’est pas moins précieuse par la fertilité d’une partie de son vaste territoire et par sa contiguïté avec les nations asiatiques. On sait que la Russie est redevable de cette acquisition au génie entreprenant d’un bourgeois notable, d’un Strogonof, souche de l’illustre famille de ce nom, qui aida de ses moyens un aventurier cosaque à s’en emparer; cet autre Pizarre en fit hommage aux tsars de Moscou dans la seconde moitié du XVIe siècle, vers le temps même où les nations européennes s’établissaient sur divers points du globe, comme si de son côté la Russie n’avait dû former qu’une puissance compacte et d’une seule pièce. En attendant que la Sibérie soit exploitée, la contrée ouralienne l’est déjà. L’industrie y forme une sorte de colonie sous un code particulier. La concession de chaque mine a été pourvue d’une dotation en sol forestier et en population, à la charge par le concessionnaire de nourrir les travailleurs, de payer les taxes, d’entretenir les églises, les hôpitaux et les écoles, le salaire de l’ouvrier n’étant que de 20 centimes. Jamais industrie n’a été mieux protégée contre la concurrence étrangère. Peut-être faudrait-il reprocher aux maîtres de forges russes, sauf quelques exceptions éclatantes parmi lesquelles on compte MM. Demidof, de s’être laissé décourager par les distances ou endormir par leurs privilèges, et de n’être pas assez soucieux d’améliorer leurs