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LA RUSSIE


ET


SES CHEMINS DE FER





I.

Une opération sans exemple sur notre continent va s’accomplir. Il s’agit de construire en Russie un réseau ferré de plus de 4,000 kilomètres de développement et d’y affecter 1,100 millions. Cette opération a été décidée au lendemain de la guerre, comme si une pareille collision ne devait pas laisser de trace. Rarement peut-être le génie financier a montré dans l’avenir une confiance plus résolue, et l’œuvre qu’il se propose l’oblige à réaliser dans des proportions imposantes une première association internationale de capitaux. Cet ensemble de faits ne manque ni de nouveauté ni de grandeur; mais au-delà de l’opération même on découvre une perspective plus saisissante encore, celle de l’Europe orientale s’incorporant à l’Europe occidentale, devenant un corps d’autant plus robuste que ses membres seront mieux liés. Les chemins de fer russes ne se présentent donc pas comme une affaire purement industrielle; avant tout, ils ont un caractère politique.

A bien voir en effet, on continue ainsi le tsar Pierre, qui transférait sa capitale aux bords de la Baltique, tournant l’empire vers l’Occident : trait admirable, parce que cela était conforme à la destinée du pays et à ses traditions. Quoi qu’on en ait dit, malgré l’occupation des Mongols et des Tatars, la Russie n’était asiatique ni par sa