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grands troupeaux de bœufs qu’en vue d’en obtenir la peau, tout ce qui reste de l’animal étant abandonné, sauf quelques rares exceptions. Des obstacles de plusieurs ordres se sont jusqu’à ce jour opposés à la réalisation du projet d’exploitation de ces ressources : les animaux en liberté sous ces climats chauds n’offrent pas tous un état convenable d’embonpoint, et la difficulté de préserver économiquement les viandes des altérations spontanées durant les transports rendait au moins douteux le succès de l’opération. Nous avons vu qu’en effet les divers procédés de dessiccation partielle avec enrobage de gélatine avaient tous échoué, lorsque les produits étaient soumis aux épreuves de l’emballage et des voyages durant deux ou trois mois.

Les regards s’étaient tournés aussi vers les possessions de la Russie méridionale, où se rencontrent de vastes pâturages et de nombreux troupeaux de moutons. Dans ces contrées, on ne sait utiliser que là peau, les toisons, le suif des animaux abattus. Tout le surplus, la chair, les tendons, les os, etc. ; est abandonné en pure perte. Ici encore le manque de moyens de conservation économique dont l’efficacité fût certaine venait entraver l’exécution du projet. En effet, une fâcheuse alternative se présentait toujours : le seul procédé de conservation, dont les bons résultats fussent assurés, c’était la méthode d’Appert perfectionnée, telle que nous l’avons précédemment décrite. Il fallait, pour que l’opération fût économique, expédier les préparations dans des vases en fer-blanc d’une contenance telle qu’on parvint à diminuer les frais résultant de la valeur de l’enveloppe en raison des quantités y contenues. Il y avait donc tout intérêt à employer les plus grands vases possibles ; mais d’un autre côté la facilité de la distribution où de la consommation, en un mot de la vente aux lieux d’arrivée, exigeait que cette distribution pût s’effectuer en petites quantités consommables immédiatement par un deux ou trois individus ; sinon, on se trouvait exposé à ne pouvoir placer les produits que dans les établissemens publics renfermant un nombreux personnel. C’était restreindre beaucoup le débouché et manquer le but principal ; qui devait être de mettre à la portée du plus grand nombre un complément précieux de l’alimentation économique des populations laborieuses. Il semblait impossible d’échapper au fatal dilemme : si l’on expédiait des préparations volumineuses, le débouché était compromis, et le but principal manqué ; si l’on employait des vases d’une faible contenance, appropriés aux exigences naturelles des consommateurs, la valeur totale des enveloppes rendait les préparations trop dispendieuses. On ne pouvait sortir de cette impasse sans quitter les voies connues ; il fallait, en un mot, ajouter aux inventions acquises une invention nouvelle.

Les choses en étaient là lorsqu’un habile manufacturier, qui déjà était parvenu à surmonter de plus grands obstacles en mettant à flot la belle industrie, plusieurs fois transformée, de la dessiccation des produits alimentaires extraits des végétaux, M. Cholet, imagina le nouveau système de conservation, transport et distribution des viandes et d’application utile des produits accessoires, tendons, os, sang, intestins et substance cornée. Ce système complet renferme des moyens connus et garantis par une longue expérience. L’inventeur y ajoute plusieurs dispositions nouvelles, propres à réduire les frais généraux ou le prix coûtant, et de nature à faciliter la distribution en petites parts sans augmenter la dépense nécessitée par les vases.