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Je ne dirai rien des langues néo-latines, liées de la décomposition du latin, et qui perdirent peu à peu le caractère synthétique et les flexions de leur mère. L’histoire de ces langues est plus connue du public instruit que celle des autres familles linguistiques, et c’est la seule branche de la philologie comparée qui ait donné chez nous naissance à un assez grand nombre de publications. J’arrive aux langues slaves ou letto-slaves, qui se décomposent en plusieurs groupes correspondant à des degrés divers du développement linguistique. Le groupe lettique ou lithuanien, qui comprend le lithuanien proprement dit, le borussien ou ancien prussien, et le lettique ou le livonien, répond à une période moins avancée que celle où apparaît le rameau slave proprement dit. Par exemple, le substantif lithuanien n’a que deux genres, tandis que le slave en reconnaît trois. La conjugaison lithuanienne ne distingue pas les troisièmes personnes du singulier, du duel et du pluriel : la conjugaison slave, au contraire, distingue nettement ces personnes au pluriel et au singulier ; mais en revanche le lithuanien garde dans sa déclinaison les sept cas et le duel, si caractéristiques dans le sanskrit : ces cas sont même parfois identiques à ceux de cette dernière langue. Les idiomes slaves proprement dits se subdivisent en deux branches, celle du sud-est et celle de l’ouest. La première comprend le russe, le bulgare, — qui nous fournit la plus vieille forme slave et se rapproche beaucoup de l’idiome dit cyrillique ou ecclésiastique, dans lequel sont composés les plus anciens monumens de la littérature chrétienne chez cette race, — l’illyrien, le serbe ou servien, le croate, le Slovène, parlé dans la Carinthie, la Carniole, une partie de la Styrie et un canton de la Hongrie occidentale. Les langues slaves de l’ouest embrassent le lekhc ou polonais, le tchèque ou bohème, le sorabe ou wende, dialecte populaire de la Lusace, et le polabe, qui, a disparu comme l’ancien prussien, et que parlaient les tribus slaves répandues naguère sur les deux rives de l’Elbe inférieur.

Les langues germaniques se rattachent, comme on l’a déjà remarqué, plus au zend et au perse qu’au sanskrit. Le perse et le zend font partie d’un groupe de langues que l’on désigne sous le nom de langues iraniennes, et qui embrasse encore beaucoup d’autres idiomes dont plusieurs ont disparu. On y rattache notamment l’afghan ou pouschtou, le beloudsche, parlé dans le Beloudschistan, le kurde, l’arménien, l’ossète, qui paraît n’être autre que la langue des peuples connus des anciens sous le nom d’Albaniens, les Aghovans des auteurs arméniens.

Cette étroite liaison des langues germaniques avec les langues iraniennes nous montre assez d’où sont sortis les peuples qui se répandirent dans l’Europe centrale, et qui chassèrent vraisemblablement devant eux les Celtes. L’histoire des langues germaniques présente quatre phases : — la période gothique ; — la période de l’ancien haut-allemand, pendant laquelle la langue se subdivise en trois rameaux, le Scandinave, le bas-allemand (anglo-saxon, néerlandais, frison), le haut-allemand proprement dit ; — la période du haut-allemand moyen ; — celle du haut-allemand moderne. Le haut-allemand ancien comprend plusieurs dialectes, tels que le bavarois, le franc, le souabe. L’affinité qui rapproche ces langues est beaucoup plus étroite que celle qu’on observe entre les langues slaves et entre les langues pélasgiques.