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que cette puissance possède encore en Amérique et en Asie ; mais le crédit espagnol repose depuis trop longtemps sur ses possessions d’outre-mer, et en proportionnant ses charges aux seules ressources du continent, on risque moins d’être déçu dans l’espérance de voir liquider les unes par les autres. L’avènement du nouveau ministère Narvaez ouvre peut-être aussi une ère nouvelle de repos intérieur, et on aurait pu prendre le règlement du budget, tel qu’il vient d’être décrété le 4 mars 1857, comme le point de départ d’un ordre plus stable et plus régulier. Cependant c’est surtout en Espagne qu’il ne faut pas prendre ses sympathies politiques pour base d’appréciations financières, et qu’on doit toujours craindre un prompt changement des hommes et des choses. En rapprochant au contraire du budget de 1857 celui de 1856, établi dans d’autres vues, en cherchant à dégager une situation moyenne, en envisageant la question financière, non pas en dehors absolument, mais au-dessus en quelque sorte de la question politique, et sous un aspect commun à tous les temps et à tous les régimes, il m’a paru qu’on devait arriver plus sûrement à une conclusion vraie, vraie surtout par rapport aux intérêts français.

C’eût été commettre d’ailleurs une erreur grave que d’attribuer en Espagne au succès de telle ou telle opinion politique une influence absolue sur le développement de la richesse générale. Sans doute il est désirable de voir la Péninsule se soustraire aux mouvemens intérieurs qui l’agitent périodiquement et adopter enfin un régime conforme à ses instincts véritables, sans doute une administration à la tête de laquelle se trouveront des hommes fermes, éclairés et honnêtes réalisera le progrès matériel ; mais quoi qu’il arrive, que l’autorité appartienne à l’un ou à l’autre des deux grands partis qui se disputent le pouvoir, le progrès se fera, et la meilleure preuve qui se puisse en donner, c’est qu’il s’est fait, c’est qu’il a été rapide même dans ces dernières années, si agitées et si malheureuses à tant d’égards. On me pardonnera d’insister en finissant sur ce point, si particulièrement rassurant pour le capital qui s’engage au-delà des Pyrénées.

En 1846, le commerce général de l’Espagne ne s’élevait qu’à 300 millions, au huitième à peine du commerce français, à la moitié de celui de la Belgique, dont la population ne dépasse pas Il millions et demi d’habitans. En 1851, on le voit atteindre 326 millions, 357 en 1852, 452 en 1853, enfin 600 millions en 1855. Pour 1856, les chiffres sont, dit-on, beaucoup plus favorables. Dans cette même année 1856, les rentes soumises à la régie ont donné 13 millions de francs de plus qu’en 1855.

Ces faits sont concluans, cette amélioration est prompte, et quand