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et la dirigeait en travers de sa direction. Ampère s’empara de ce fait, qui avait épuisé le génie peu étendu d’OErsted, et il en conclut que si la terre dirige les aimans du nord au sud, c’est qu’elle est parcourue par des courans électriques qui vont de l’est à l’ouest. Tout porte à croire en effet qu’en vertu de son mouvement diurne de l’ouest vers l’est, la terre peut être considérée comme ayant dans son intérieur des courans allant de l’est à l’ouest, non pas tout à fait exactement, mais à peu près, à cause de ses inégalités de conformation, en faisant l’office d’une vaste pile dont le courant aurait la direction indiquée plus haut. Cette hypothèse admise, les aiguilles aimantées devaient se mettre nord et sud, en vertu d’un courant est et ouest. Il y a plus, ces aiguilles suspendues librement devaient plonger par la pointe la plus voisine du pôle, ce que l’expérience avait appris depuis longtemps. Au reste, l’expérience a été faite en Angleterre. On a recouvert de fils métalliques allant de l’est à l’ouest un grand globe représentant la terre, et quand le courant de la pile parcourait ces fils, on voyait ce globe, artificiellement électrique, produire les mêmes effets que la terre, diriger l’aiguille aimantée du nord au sud, l’incliner vers le pôle voisin, et enfin la ramener par des oscillations plus ou moins rapides à sa position de repos définitif, suivant les mêmes lois auxquelles obéit la terre, ramenant par oscillations la boussole ordinaire à sa position d’équilibre définitif. Depuis l’ouvrage de Gilbert, publié en 1600, on savait que le globe terrestre se conduisait comme un vaste aimant. Ampère, en 1820, nous dit : « C’est à des courans voltaïques que le globe doit cette propriété d’être un grand aimant ; l’aimantation, le magnétisme, ne sont que de l’électricité. Avec de l’électricité seule, on peut reproduire tous les phénomènes des aimans sans fer ni acier, ni mine de fer, de l’île d’Elbe ou des Pyrénées, ou de l’Asie-Mineure. » Je me bornerai aujourd’hui à ces notions, dont l’importance appelle des développemens qui nous serviront, en définitive, à étudier le globe terrestre sous le point de vue de son aimantation avec toutes les mille modifications que les localités, l’épaisseur des continens, la position du soleil, l’influence des saisons, des ans et des siècles, introduisent dans ce vaste système électrique, et par suite magnétique, d’après les lois établies par Ampère et par ceux qui l’ont suivi dans le second quart de notre siècle. Nous allons donc essayer de comprendre comment la terre est une vaste machine électrique, comment l’électricité circule dans sa masse et à sa surface, ce qui entretient cette pile en perpétuelle activité, enfin ce qui produit les changemens journaliers, mensuels, annuels et séculaires que l’observation y fait reconnaître, et de plus nous dirons un mot de l’électricité qui nous donne les aurores boréales, météores dont la cause est encore fort obscure.