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était de 26 millions et demi, y compris le département de Vaucluse, qui n’a été ajouté que plus tard. Vingt-cinq ans après, en 1815, elle était, suivant toutes les apparences, de 29 millions et demi, différence en plus 3 millions ; trente ans après, en 1846, elle était de 35,400,000, différence 6 millions ; dix ans après, en 1856, elle est de 36 millions ; différence 600,000 âmes : d’où il suit que, pendant la période révolutionnaire et impériale, la population s’est accrue en moyenne de 120,000 âmes par an, — pendant la période de la restauration et de la monarchie constitutionnelle, de 200,000, — et dans les dix ans écoulés depuis 1846, de 60,000. Or, d’après Malthus, la puissance virtuelle de multiplication est telle chez l’homme, que, si elle n’était pas arrêtée par le défaut des subsistances, la population pourrait doubler en vingt-cinq ans ; elle aurait pu être à ce compte en France de plus de cent millions en 1846. Ce qui l’a empêchée d’arriver si haut, c’est le défaut des subsistances. Nous savons en effet que, de 1790 à 1846, la production agricole a seulement doublé. D’un autre côté, si la population avait marché exactement du même pas, elle aurait été en 1846 de 53 millions ; elle n’était cependant que de 35 et demi. D’où vient cette nouvelle différence ? D’une amélioration progressive dans les conditions de la vie moyenne. La répartition des subsistances entre les habitans donnait en 1790, je suppose, 100 francs par tête ; la même répartition en 1846 donnait 150 francs. En ajoutant la production industrielle et en supposant par exemple que cette production fût en 1790 de 50 francs par tête et en 1846 de 150, l’aisance moyenne aurait doublé ; c’est en effet ce qui a dû arriver, et si nous tenons compte de l’élément indiqué par Malthus comme la véritable mesure de la prospérité des peuples, la longévité moyenne, nous trouvons que, dans cet intervalle, la durée de la vie chez les Français a passé de 28 ans à 39.

Si enfin nous voulons rechercher quelle est, dans le cours de ces cinquante-six ans, la période où la vie moyenne s’est le plus accrue, nous trouverons qu’elle coïncide avec celle où l’ensemble de la population a monté le plus vite, c’est-à-dire de 1815 à 1846. Si les choses s’étaient passées avant 1815 comme après, l’accroissement de population aurait été en tout de 11 millions d’âmes au lieu de 9, et la durée moyenne de la vie se serait augmentée de 15 ans au lieu de 11. Ce double progrès allait en s’accélérant à mesure qu’on avançait ; telle était la situation de la France dans les années qui ont immédiatement précédé 1847, que la population s’augmentait chaque année de 200,000 âmes, et qu’en même temps la durée moyenne de la vie s’accroissait d’un an tous les trois ans.

Ces résultats étaient satisfaisant. Auraient-ils pu l’être davantage ? Assurément. Dans presque tous les pays qui nous entourent,