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Cette lutte n’est point finie ; elle s’est engagée vivement il y a deux mois, si l’on s’en souvient, à l’occasion de la discussion du budget. On peut se souvenir aussi que le ministre de l’intérieur, M. Simons, finissait par voir la majorité se tourner contre lui dans le vote des dépenses de son département. Il en était ainsi lorsque survenait une suspension momentanée des travaux parlementaires. Le ministre de l’intérieur, soutenu par ses collègues, ne se retirait point d’abord devant les témoignages de défiance des chambres. Il se mettait à l’œuvre, au contraire, pour préparer la loi tant attendue sur l’instruction publique. M. Simons n’a point tardé à voir cependant que sa position était insoutenable, et il a insisté pour quitter le pouvoir. Il a été remplacé à l’intérieur par le ministre des cultes réformés, M. van Rappard, qui a eu lui-même pour successeur dans son ministère un jurisconsulte d’Amsterdam, M. Wiardi Beckman. M. van Rappard est un homme d’une longue expérience, calme et habile Il n’a point été à l’origine partisan de la réforme constitutionnelle de 1848 ; il passe pour s’y être résigné depuis. On pouvait craindre que ce revirement ministériel n’eût encore pour effet d’ajourner la question de l’instruction primaire. Il n’en a rien été, et dès la reprise récente des travaux parlementaires, M. van Rappard a présenté un projet qui est en ce moment soumis à la seconde chambre. Le nouveau projet ressemble en partie à celui qui est resté en suspens dans la session dernière, et qui a été retiré à la suite de l’avènement du ministère actuel ; il y a aussi quelques différences. Les deux points essentiels sur lesquels le projet nouveau diffère de celui de l’an dernier sont la disposition prescrivant aujourd’hui que les enfans doivent être élevés dans la pratique des vertus « chrétiennes et sociales, » tandis que l’ancien projet se servait de termes plus vagues, et la faculté qui serait accordée d’instituer des écoles spéciales sauf l’autorisation du gouvernement, avec l’assentiment des autorités locales et des états-généraux. De nombreuses critiques se sont élevées dans la presse et dans les bureaux de la chambre contre cette dernière disposition, dans laquelle on ne voit qu’un prolongement à l’infini de la lutte sur la question de l’instruction primaire. Quoi qu’il en soit, la chambre est saisie, et le travail de ses bureaux vient d’être communiqué au gouvernement, qui a devant lui quelques semaines pour répondre. Ainsi ce n’est que dans quelque temps que la discussion pourra s’ouvrir.

Cette discussion mettra-t-elle fin à une difficulté qui depuis deux ans pèse sur la situation intérieure de la Hollande ? conduira-t-elle à une dissolution du parlement ou à une nouvelle modification du ministère dans le cas où le système proposé ne triompherait pas ? Ce sont là encore autant de points incertains. En attendant que ces luttes recommencent, le cabinet de La Haye ne laisse point d’avoir à faire face à des difficultés d’une autre nature. Pour le ministre de la justice, il y a la défense laborieuse d’un projet récent sur l’organisation judiciaire qui a soulevé de nombreuses contradictions. Pour le ministre des colonies, c’est une autre question : le règlement de la presse aux Indes-Orientales. Ce règlement, promulgué à Batavia il y a quelques mois, est jugé trop préventif et trop répressif tout à la fois, et peu compatible avec les idées dominantes en Hollande, peu en harmonie aussi avec ce qui se pratique aux Indes depuis longtemps. Les plaintes des publicistes et des éditeurs se sont traduites par des pétitions qui ont eu de