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jet des méfiances de bien des hommes d’état anglais. Elle a suscité à la Grande-Bretagne des inimitiés nombreuses, et elle n’a pas toujours été à l’abri de ce reproche, que lui adressait M. Cobden, d’être arrogante avec les faibles, humble avec les forts, de se servir de toutes les armes, et d’intervenir partout. Lord Palmerston a expié en un jour, et dans une question donnée, les excentricités de sa politique, et sa défaite a été un baume pour bien des blessures. Maintenant lord Palmerston se relèvera-t-il par la dissolution du parlement ? que va-t-il résulter de cet appel au pays ? L’Angleterre, avec des pensées très fixes sur certains points, est mobile dans ses impressions. Selon toute apparence, le gouvernement obtiendrait aujourd’hui la majorité ; peut-être aussi dans quelques jours, la première émotion un peu calmée, cette majorité se trouvera-t-elle diminuée. Ce qui vient de se passer dans la Cité de Londres, au sujet de la candidature qu’on voulait offrir à lord Palmerston, ne prouve pas que l’opinion soit absolument dévouée au chef du gouvernement. Une chose est remarquable dans cette lutte qui va s’ouvrir, c’est l’absence de tout caractère politique, pour ainsi dire. Il n’y a point de principes en jeu, point de partis disciplinés et unis pour faire triompher une idée, une opinion. C’est une force pour lord Palmerston, dira-t-on ; c’est peut-être aussi une faiblesse, parce qu’une majorité sans lien moral, mobile et fuyante, n’offre pas un très solide point d’appui, et dans tous les cas, au milieu de ce morcellement des opinions, lord Palmerston se trouvera toujours en présence des hommes les plus considérables du parlement, qui recommenceront la lutte dans la chambre nouvelle. Ces coalitions, où il y a souvent plus de chefs que de soldats, sont un danger sans doute. Il en sera vraisemblablement ainsi tant que les partis, autrefois si puissans en Angleterre et aujourd’hui décomposés, ne se seront pas reconstitués.

Ces questions ne s’agitent point parmi nous. La France est l’alliée de l’Angleterre, mais elle ne l’imite pas ; elle est son alliée très indépendante sous plus d’un rapport, et si elle a, elle aussi, des intérêts extérieurs sur lesquels elle se rencontre souvent avec la Grande-Bretagne, elle a une vie intérieure dont les formes et le caractère se rattachent à un tout autre ordre d’idées et d’événemens. Quels sont aujourd’hui les points saillans de cette vie intérieure ? Il en est peu sans doute. Le corps législatif, depuis qu’il est réuni, n’a pas eu à montrer une grande activité. Voici cependant une affaire d’une certaine importance qui va lui être soumise, une affaire de finance qui soulève plus d’un problème : c’est celle de l’impôt projeté sur les valeurs mobilières. La question vient d’être étudiée par le conseil d’état, qui s’est réuni plusieurs fois sous la présidence même de l’empereur, et de cette élaboration il sort un projet dont les dispositions principales sont aujourd’hui publiques. Le droit établi par une loi de 1850 pour la circulation et le timbre des actions et obligations serait porté de 5 centimes à 15 centimes pour 100 francs du capital réel réglé tous les trois ans d’après le cours moyen. Ce droit serait annuel et obligatoire. En outre, un règlement d’administration publique déterminerait le mode d’application de ce droit aux valeurs étrangères négociées en France. Le conseil d’état s’est donc prononcé, et a formulé cette pensée d’un impôt sur les valeurs mobilières qui préoccupait depuis quelque temps déjà. Maintenant c’est au corps législatif d’examiner la question, de la traiter à son tour et de la résoudre. Toutes les objections pourront se pro-