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CHANT DE LABOUR


Plus loin ! creusez encore un plus vaste sillon,
Mes fiers taureaux, avant de rentrer à l’étable ;
Ma voix excite encor d’un paisible aiguillon
Votre lenteur infatigable.

Le travail presse, amis ! il faut qu’il dure encor ;
Il faut de l’héritage avoir atteint les bornes,
Avant que ce sommet cache le globe d’or
Qui luit en face entre vos cornes.

Retournons bien ce sol du levant au couchant ;
Qu’il offre un lit fécond au grain que l’on y sème !
Je veux, pour de longs jours, fertiliser mon champ
Avant de m’y coucher moi-même.


LES OISEAUX DE PASSAGE


Plus loin toujours, ô laboureurs,
Poussez le soc de vos charrues ;
Plus loin, oiseaux avant-coureurs,
Lancez vos ailes dans les nues !
Voici l’hiver et ses horreurs ;
Passez, corbeaux, cygnes et grues.

Dans nos bois, où rôdent les loups,
Un vent noir déjà siffle et gronde.
Cherchez un asile plus doux,
Un ciel où la lumière abonde.
Volez, oiseaux, précédez-nous ;
Allez trouver un meilleur monde !

S’il est des pays sans hivers,
Des flots que nul vent ne déchire ;
S’il est des jardins toujours verts,
Où les yeux ne font que sourire,
Où les cœurs sont toujours ouverts…
Oiseaux, revenez me le dire !

Pour vous suivre, et sous ce ciel d’or
Guérir le mal dont je succombe,
Mon âme a déjà pris l’essor ;
J’ai les ailes de la colombe.