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de divers districts tels que ceux de Cuernavaca et de Cuantla, et, sans doute pour appuyer sa demande, il s’est avancé à la tête d’une force d’Indiens vers ces districts qui ont reçu le nom de Tierra caliente, où sont répandues de riches propriétés appartenant principalement à des Espagnols. Malgré tout, le congrès a résisté à ces prétentions, et le président substitué, le général Comonfort, a peut-être encouragé cette résistance, dans l’espoir secret que le chef du sud irrité viendrait avec ses Indiens en finir avec l’assemblée. Il n’en a point été ainsi, Alvarez ne s’est point occupé du congrès, mais alors ont commencé les actes de vandalisme qui ont coïncidé avec l’arrivée des Indiens dans la Tierra caliente. Des fermes ont été saccagées par des bandes qui se sont répandues dans la campagne ; des malheureux ont été massacrés, et, chose singulière, un Français qui se trouvait là a été épargné ; les Espagnols seuls ont été traités sans pitié ; contre eux, la guerre à mort a recommencé. Maintenant, d’où vient cette haine furieuse qui s’assouvit encore dans le sang ? Elle ne date point d’aujourd’hui, elle remonte au temps de l’indépendance. Entre les républiques nouvelles de l’Amérique, le Mexique s’est toujours distingué par une sorte d’aversion contre ses anciens maîtres. Un jour même, en 1829, une loi vint décréter, l’expulsion en masse des Espagnols. Ce sentiment, qui à une certaine époque a été principalement fomenté par les agens des États-Unis, est surtout le propre du parti démocratique, et toutes les fois que ce parti triomphe, les mêmes haines se font jour, comme cela est arrivé depuis la dernière révolution. Peu après la disparition de Santa-Anna, au milieu de la plus complète anarchie, on célébrait à Mexico l’anniversaire de l’indépendance en déclamant au théâtre les plus violentes injures contre l’Espagne et les Espagnols. Il en était ainsi, lorsque s’élevait, l’an dernier la question des traités relatifs aux diverses dettes reconnues par le Mexique au profit de sujets de l’Espagne. Par un décret, on peut s’en souvenir, le congrès mexicain mettait tout simplement le séquestre sur les propriétés espagnoles, à quoi le cabinet de Madrid répondait en faisant paraître une force navale devant la Vera-Cruz. L’affaire s’était assoupie cependant, elle vient de se réveiller par les sauvages excès commis dans les districts de Cuernavaca et de Cuantla. Or ici il s’élève une autre question. Quelle est la part de responsabilité du gouvernement, que ce gouvernement soit celui du président propriétaire ou celui du président substitué, qu’il s’appelle Alvarez ou Comonfort ? Alvarez, il est vrai, nie toute participation à de tels actes ; mais s’il ne les a pas ordonnés, il ne les a ni empêchés ni réprimés, et, dans tous les cas, il ne paraît pas douteux que ses bandes d’Indiens n’y aient contribué. Les attentats de la Tierra caliente ont été commis presque en présence de ses lieutenans, qui sont tout au moins restés inactifs, et qui n’ont point été fâchés peut-être de voir les Espagnols expier l’opposition qu’ils avaient faite à l’annexion du district de Cuernavaca à l’état de Guerrero. D’un autre côté, l’anarchie de cette malheureuse république explique seule comment de semblables crimes peuvent se produire à quelques lieues de Mexico. Le général Comonfort, qui est le moins coupable, à coup sûr, a envoyé quelques troupes après l’événement. Son impuissance est si grande, qu’il a eu de la peine à obtenir d’Alvarez qu’il rappelât ses Indiens et les ramenât vers le sud. Il a fallu négocier : le vieux chef, le rusé cacique, réclamait de l’argent. Quoi qu’il en soit, voilà une querelle nouvelle entre le Mexique et l’Espagne. Le cabinet de Madrid