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de l’empire, et il laissa aux Alamans, sous certaines conditions, une partie des terres dont ceux-ci s’étaient emparés dans la première Germanie.

Quand l’œuvre de délivrance fut assez avancée du côté du nord, Constantin se tourna vers le centre et l’ouest des Gaules, que les Alains, les Vandales et les Suèves ne craignaient pas de venir piller presque sous ses yeux, tant Liménius leur avait fait croire à l’impunité, Il eut le bonheur de dégager l’Armorique comme il avait dégagé des contrées rhénanes, et l’Armorique, on peut le supposer sans invraisemblance, reconnut ce service en se déclarant pour lui. Restaient encore les provinces du midi, qui, placées sous la main du préfet du prétoire, semblaient des victimes vouées à l’impuissance ou à la lâcheté de ce représentant du gouvernement romain. Uniquement occupé à garantir sa résidence, il avait concentré aux environs d’Arles tout ce qu’il possédait de troupes, et ce qui s’étendait ’hors de ce rayon était livré impitoyablement à la merci des Barbares. Ces malheureuses contrées enviaient le destin des provinces du nord ; elles appelaient à grands cris le tyran, qui ne demandait pas mieux que de leur obéir, mais qui ne se dissimulait pas la gravité d’une guerre dans laquelle il irait engager sa personne et son armée entre deux adversaires capables de se réunir contre lui, les Barbares et Liménius. Les derniers mois de l’année 407 et les premiers de l’année 408 se passèrent, suivant toutes probabilités, en instances d’un côté, en hésitations de l’autre. Au printemps suivant, Constantin se décida enfin à marcher directement sur Arles.

Depuis plus d’un an que l’invasion de la Gaule était consommée, cette province n’avait reçu de l’Italie, malgré ses incessantes supplications, ni un homme ni un deniers Honorius, tout entier aux intrigues de la cour de Ravenne et aux trames qu’il ourdissait lui-même pour perdre Stilicon, la laissait se débattre, comme elle pourrait, sous le poids de ses maux. Liménius avait beau écrire lettres sur lettres, ses dépêches restaient sans réponse, ou pour tout réconfort la chancellerie impériale lui conseillait la patience ; mais sitôt que le fils de Théodose eût commencé à comprendre que l’obscur soldat, le ridicule tyran qui prétendait prendre sa place, était un homme de sens et d’énergie, qu’une moitié de la Gaule lui devait déjà son salut, et que l’autre voulait le lui devoir, il sortit brusquement de sa torpeur, et une anxiété fébrile succéda à sa trop longue quiétude. Il se trouvait à Rome au moment où lui parvint la dépêche par laquelle Liménius lui annonçait les préparatifs de guerre et le prochain départ du tyran. Mandant aussitôt près de lui Stilicon, qui était à Ravenne, il lui enjoignit d’envoyer, toute affaire cessante, une armée au-delà des Alpes, quelques difficultés que présentassent les circonstances, car Alaric, campé sur la frontière illyrienne, venait