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que les prêtres exerçant leur ministère dans les chefs-lieux des évêchés et réputés les plus capables, choisiraient parmi eux un représentant par diocèse. Ainsi le clergé sera représenté dans la Valachie par quatre évêques, dont un métropolitain, par quatre députés des monastères dédiés et des monastères non dédiés, et quatre délégués des simples prêtres. Le clergé ne compte que dix représentans dans la Moldavie, où il n’y a que trois diocèses.

Le mode de représentation des boyards soulevait des questions plus graves, et au milieu desquelles il n’est pas toujours facile de se reconnaître. Le firman primitif de la Porte faisait une position toute spéciale aux boyards de première classe, et leur attribuait un droit particulier de représentation. La Turquie obéissait à une tradition. Lord Stratford de Redcliffe lui-même peut-être s’était laissé prendre à cette idée. Il croyait voir dans les grands boyards, formant un comité spécial au sein du divan, une sorte de chambre des pairs ; mais il est évident que la Turquie ne faisait que consacrer un abus, et que l’ambassadeur d’Angleterre caressait une illusion fondée sur une appréciation inexacte de la boyarie telle qu’elle existe dans les principautés. Cette boyarie en effet n’a nullement le caractère d’une aristocratie véritable ayant l’illustration de la naissance : elle ne constitue pas une qualité transmissible par voie d’hérédité ; elle n’est qu’une fonction, un rang viager. Les enfans peuvent arriver à leur tour à occuper les positions que leurs pères ont acquises ; ils n’y ont point essentiellement droit. D’ailleurs, si on admettait à la représentation les boyards de première classe, comment repousser les boyards des classes suivantes ? Ceux-ci participent à la nomination des hospodars ; le droit de se faire représenter au divan n’était pas assurément moins important et moins précieux. Il, s’ensuit que les boyards de première classe, n’ont aucun titre particulier pour exprimer en leur qualité de boyards les vœux du pays ; mais s’ils n’ont pas le caractère d’une grande et sérieuse aristocratie, ils sont les propriétaires les plus considérables, et à ce point de vue ils ont droit à une part notable, prépondérante même si l’on veut, dans les divans. C’est de ces considérations qu’on est parti pour arriver à une nouvelle combinaison qui admet tous les boyards indistinctement à la représentation. En même temps le cens électoral a été réduit. Il fallait d’abord, d’après le premier firman, posséder cinq cents falches de terre pour être électeur, il ne faut plus posséder aujourd’hui que cent faiches. Ce cens d’éligibilité est attribué à la possession de trois cents falches de terre cultivable. Cette combinaison n’était pas seulement dictée par la justice, elle était très politique. Restreindre la représentation aux seuls boyards de première classe, c’était, évidemment livrer la place à l’esprit de caste. Comme tous les grands boyards sont plus ou moins candidats à l’hospodarat, ils se seraient hâtés, on le comprend, de rejeter l’idée de l’union des principautés. En élargissant la représentation dans le comité des boyards, on a offert au pays un moyen, sinon infaillible, du moins plus facile de manifester ses voeux.

Le grand-vizir Rechid-Pacha et le ministre des affaires étrangères turc, Ethem-Pacha, ont d’abord hésité un peu devant ces innovations, qu’ils n’ont point tardé cependant à accepter, et lord Stratford, après avoir demandé à réfléchir, a fini lui-même par se rendre de bonne grâce. Si on les examine bien, les autres dispositions relatives à la représentation des autres classes de propriétaires, des villes, et même des paysans soumis à la corvée, ont