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Les règlemens des messes de l’armée anglo-indienne sont à peu près les mêmes que ceux de l’armée royale. La table est présidée à tour de rôle par chaque officier, et ce rôle de maître de maison, que remplissent même les plus jeunes, sert à développer dans les états-majors sans aucun doute ces manières élégantes que l’on remarque chez la plupart des officiers anglais. Les jeux de hasard sont prohibés dans l’établissement de la mess ; mais on y trouve généralement un billard.

En regard des officiers anglais employés dans l’armée de la compagnie, plaçons maintenant les soldats et les officiers natifs. La compagnie des Indes, en donnant pour base à sa puissance une armée native, a dû prendre soin que les armes des cipayes ne pussent jamais se tourner contre elle. À cet effet, des règlemens d’une haute sagesse politique prescrivent de composer les régimens d’hommes des deux religions qui divisent la population de l’Inde, et y forment deux nations rivales. Dans l’infanterie, la proportion réglementaire est de deux tiers d’Hindous et un tiers de musulmans. Depuis la conquête du Punjab, on admet les Sicks dans la proportion d’un dixième, soit une compagnie par régiment. Les soldats d’infanterie appartiennent aux castes des brahmes, rajpoots, choutries, gwallahs ou pasteurs ; ces derniers donnent des soldats fort estimés pour leur docilité et leur bravoure. La grande majorité des cipayes de l’armée du Bengale, dont nous nous occupons ici spécialement, est fournie par les populations des provinces nord-ouest et du royaume d’Oude. Dans la cavalerie, les régimens sont invariablement composés mi-partie de musulmans, mi-partie d’Hindous. Le recrutement s’opère sans l’intervention du gouvernement. Lorsqu’un vieux soldat revient au régiment après un congé passé dans ses foyers, il ramène souvent avec lui un ou plusieurs jeunes gens de son village qui désirent prendre du service dans l’armée native, où ils sont admis après avoir présenté leurs certificats de caste et passé la visite du médecin. Il n’y a pas de limite d’âge, et l’on comprend que parmi ces populations primitives il soit impossible de vérifier exactement l’âge des recrues. L’on peut toutefois fixer approximativement, sans grandes chances d’erreur, à dix-huit ans et à vingt-deux ans les limites d’âge minimum et maximum des conscrits.

La solde des cipayes varie de 7 à 9 roupies par mois, suivant le nombre d’années qu’ils Ont servi. Si l’on remonte l’échelle des grades accessibles aux cipayes, on rencontre d’abord le naïck, qui touche par mois 12 roupies, le havildar, qui en reçoit 14. Le jemmadar et le soubadar[1] ont une solde mensuelle, le premier de 40, le second

  1. Native commissioned officer, c’est le grade le plus élevé auquel puisse atteindre un soldat natif.