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C’est le 11 seulement dans la matinée que le duc de Vicence put communiquer à M. de Metternich d’abord le premier contre-projet, que le ministre autrichien ne daigna même pas discuter, puis le second, qui devint l’objet d’un débat sérieux. M. de Metternich s’étonna de notre prétention de conserver Hambourg et Lubeck, et de retenir Trieste. « L’empereur Napoléon » dit-il au duc de Vicence, sait bien qu’il n’y a de port qu’à Trieste, que Fiume n’en est pas un que c’est par conséquent Trieste qu’il nous faut, non pour menacer personne, mais pour vivre. » Du reste il déclara que la situation de l’Autriche était changée depuis quelques heures, qu’hier encore elle était médiatrice, qu’aujourd’hui elle né l’était plus, qu’elle ne pouvait plus se prêter à des ouvertures qui ne seraient pas adressées en même temps aux trois cours, mais que l’empereur d’Autriche n’en persisterait pas moins à soutenir avec le plus grand zèle la cause de la paix, que l’empereur Alexandre serait le 15 à Prague, et que l’on pourrait traiter directement avec ce souverain.

Ne sachant s’il devait rester à Prague ou partir, M. de Caulaincourt demanda le 11 de nouvelles instructions, et surtout des pouvoirs en règle ; il ne cacha pas à l’empereur que sur certains points l’Autriche serait inflexible. « Elle voudra absolument Trieste. Jamais nous n’obtiendrons qu’elle donne la moindre indemnité à la Saxe-Hambourg et Lubeck seront une grave difficulté. » Le 12, il annonça qu’il ne désespérait encore de rien ; mais en même temps il conjura l’empereur de ne pas insister sur des points secondaires tels que Trieste. Il ajouta que l’empereur François était soupçonneux, et lui supposait l’intention de rester à Prague pour y attendre l’empereur Alexandre et ouvrir avec ce souverain une négociation séparée. Toute la crainte du duc de Vicence était que l’empereur d’Autriche, de peur d’être pris au dépourvu, ne précipitât les événemens. L’empereur reçut cette dépêche dans la journée du 13, et il prit aussitôt ses dernières décisions. Le duc de Bassano écrivit sous sa dictée au duc de Vicence :


« Nous refusons Trieste, parce que Trieste, c’est l’Istrie, et l’Istrie pour nous ne veut pas dire l’Istrie, mais Venise. Il est de l’honneur de la France d’exiger des indemnités convenables pour le roi de Saxe. Nous demandons qu’il ne soit question ni de Hambourg ni de Lubeck. Vous pouvez donner communication à M. de Metternich de l’ultimatum de sa majesté. Nous vous envoyons les pouvoirs nécessaires pour tout signer en deux heures. C’est à l’Autriche maintenant à proposer nos conditions à ses alliés. S’ils les acceptent, vous traiterez par le canal de l’Autriche. Nous aimons mieux qu’elle négocie pour nous, étant en guerre avec nous, qu’en qualité de médiatrice ; Cela est plus honorable pour elle comme pour nous. Si elle rejette notre ultimatum, il faudra en conclure, ou qu’elle ne sera pas d’accord avec nous