Page:Revue des Deux Mondes - 1857 - tome 7.djvu/560

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

duc de Bassano : « On est déjà ici sur un volcan ; les momens sont comptés ; nos retards ont produit un mauvais effet. Tout ce que j’apprends me fait doublement regretter que l’empereur vous ait, comme à moi, lié les mains plus qu’il ne l’avait promis. »

Aussitôt après l’arrivée du duc de Vicence, les conférences s’ouvrirent. Une première difficulté s’éleva. Conformément à l’usage, les plénipotentiaires donnèrent copie de leurs pleins pouvoirs : le nom de l’Autriche, comme puissance médiatrice, était omis dans les pouvoirs du duc de Vicence et du comte de Narbonne. Nos plénipotentiaires demandèrent des pouvoirs plus réguliers. La question du mode qui serait adopté pour les négociations reparut ensuite dans toute sa force. Le langage de M. de Metternich fut cette fois aussi net qu’à Dresde il avait été vague. Il proposa formellement (note du 29 juillet) d’adopter la marche suivie au congrès de Teschen. MM. d’Anstett et de Humboldt s’empressèrent (note du 30 juillet) d’accepter le mode proposé ; mais Napoléon avait prescrit formellement à ses plénipotentiaires de le repousser : il entendait qu’ils se missent en rapports directs et sympathiques avec les plénipotentiaires russe et prussien, pour tâcher de les isoler de M. de Metternich. Le but qu’il avait poursuivi vainement à l’abbaye de Whalstadt, à Plesswick, à Newmarck, il s’efforçait de l’atteindre à Prague. Conformément aux ordres qu’il leur avait donnés, le duc de Vicence et le comte de Narbonne insistèrent pour que tous les plénipotentiaires pussent traiter en conférences verbales. Les négociations furent ainsi arrêtées dès le début, et le duc de Vicence ainsi que le comte de Narbonne durent en référer à Dresde. Leur dépêche n’y trouva plus l’empereur ; il en était parti pour se rendre à Mayence, où il avait donné rendez-vous à l’impératrice Marie-Louise. Le voile qui cachait le secret de cette entrevue tout intime n’a point encore été soulevé. Il est vraisemblable que Napoléon voulut non-seulement initier l’impératrice au péril de la situation, mais encore l’engager à écrire à l’empereur son père afin de toucher son cœur et de préparer le succès de la démarche décisive que la gravité des circonstances allait le forcer à tenter auprès de ce souverain.

L’altitude prise par les plénipotentiaires russe et prussien à Prague était systématiquement répulsive à l’égard de nos envoyés. Ils évitaient toutes les occasions de les rencontrer, et témoignaient la plus vive impatience d’en finir et de partir. M. de Metternich avait une contenance et un langage bien différens. Voulait-il alors la paix aussi fermement qu’il la désirait quelques mois auparavant ? Assurément non : la bataille de Bautzen, et plus encore les revers que nos armes venaient d’essuyer en Espagne l’avaient enhardi ; il se sentait irrésistiblement poussé vers la guerre par l’élan belliqueux des populations. Cependant il persistait à jouer son rôle de médiateur