Page:Revue des Deux Mondes - 1857 - tome 7.djvu/551

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

en informer le cabinet de Vienne, afin que, dans le cas où des corps alliés voudraient chercher un refuge en Bohême, il fût pris des mesures pour les en repousser. Les choses étaient dans cet état critique, lorsque tout à coup, inspiré sans aucun doute par le désir d’assurer la conclusion d’un armistice qui seul pouvait sauver les alliés et lui épargner à lui-même le danger d’une rupture prématurée, l’empereur d’Autriche quitta Vienne et se transporta au château de Gitschinn, situé sur la frontière de Bohême. Il intervint personnellement auprès des souverains alliés et leur fit comprendre l’immense intérêt qu’ils avaient tous à gagner du temps. Grâce à ses vives instances, ils consentirent à ce que la durée de l’armistice fût étendue jusqu’au 20 juillet, que la ville de Breslau fût neutralisée, et que celle de Hambourg restât occupée par celle des deux armées qui s’en trouverait en ce moment maîtresse. La convention qui réglait ces conditions fut signée le 4 juin à Plesswick et ratifiée le 5. L’empereur Napoléon chargea le colonel de Flahaut et le marquis de Moustier d’en assurer l’exécution, puis il retourna à Dresde. En quittant Newmarck, il dit : « Si les alliés ne veulent pas de bonne foi la paix, cet armistice peut nous devenir bien fatal. » La même pensée l’a poursuivi à Sainte-Hélène. Faisant un triste retour sur cette année 1813 qui a décidé de sa destinée, le prisonnier de Sainte-Hélène a condamné le parti qu’il avait pris : « J’ai eu tort, disait-il à ses compagnons de captivité, de consentir à l’armistice, car si j’eusse continué de marcher en avant comme je le pouvais, l’empereur mon beau-père n’eût pas pris parti contre moi. » Il est entré plus d’amertume que de vérité dans cette appréciation, et les considérations d’ordre supérieur qui, dans cette phase si critique de sa vie, ont inspiré sa détermination semblent justifier complètement sa conduite.

Napoléon était à peine de retour à Dresde, qu’il reçut la visite du comte de Bubna. L’envoyé de l’empereur d’Autriche vint lui annoncer que décidément on ne pouvait plus espérer que l’Angleterre concourût à l’œuvre de la paix, qu’elle élevait des prétentions exorbitantes, qu’elle poussait l’exigence au point de trouver les conditions du traité de Lunéville trop favorables à la France, et que l’on se contenterait pour le moment de faire une paix continentale. Puis M. de Bubna exposa le mode de négociation que sa cour désirait adopter. Les plénipotentiaires de Russie et de Prusse remettraient entre les mains de M. de Metterhich la substance de leurs propositions ; l’empereur Napoléon lui ferait également connaître les bases sur lesquelles il était disposé à traiter, et le ministre médiateur se chargerait de porter à la connaissance des uns les propositions des autres. De cette manière, le médiateur centraliserait dans ses mains tous les travaux de la négociation. Napoléon repoussa énergiquement