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et voilà encore un des moyens que l’on célèbre comme la panacée des maux de la nation italienne !

Les publicistes italiens se tromperaient fort, s’ils persistaient à croire qu’en pensant et parlant ainsi, ils servent leur cause. Ils lui font le plus grand mal au contraire. Non-seulement en effet ils l’égarent sur le terrain national à la poursuite de desseins ou prématurés, ou chimériques, ou violens, mais hors de l’Italie, chose dont nous sommes témoins et sur laquelle ils peuvent nous en croire, ils la déconsidèrent comme à plaisir. Comment en serait-il autrement ? Qu’ils en soient juges eux-mêmes : on ne les entend, à un très petit nombre d’exceptions près, que parler de guerre générale, de république universelle, que dis-je ? de palingénésie religieuse. Est-il possible qu’un tel langage n’indispose pas violemment contre eux et partant contre leur cause l’immense parti de la conservation dans toute l’Europe ? — Comment ! se dit ce parti, sans le concours duquel, qu’on ne s’y trompe pas, moins que jamais aujourd’hui il n’y a rien de durable ni de possible, comment ! l’Italie ne peut être sauvée que si l’Occident tout entier entre en guerre, si tous les gouvernemens établis sont non pas améliorés, mais renversés, si l’unité catholique enfin, cette unité, le dernier lien qui rattache entre eux tous les membres de la race latine et qui puisse encore en faire un tout à opposer à l’unité anglicane ou à l’unité slavo-grecque, se déchire ! Il faut courir d’aussi effroyables aventures pour que les Italiens aient la satisfaction d’être les maîtres chez eux et d’arriver, après des dissensions civiles plus ou moins longues, à se mettre d’accord sur la forme de gouvernement qui leur plaira le mieux ! Mais, si pour sauver un membre depuis si longtemps malade du corps politique européen, il faut ainsi risquer l’existence de ce corps lui-même, ce qu’on appelle la question italienne alors n’est plus qu’un horrible danger, et ce n’est pas à la résoudre qu’il faut travailler, c’est à s’en défaire. — Telle est la violente réaction que les publicistes italiens de l’école du rinnovamento provoquent, par leurs imprudentes paroles, dans l’immense majorité du parti conservateur en Europe. Qu’ils réfléchissent eux-mêmes au mal que peut faire à la cause de l’Italie la détestable et fausse renommée que, sans y prendre garde, ils lui font ainsi d’être inséparable de celle d’une révolution destinée à bouleverser toutes les croyances et tous les intérêts du reste de l’Occident.

On se demande pourquoi les esprits les plus distingués eux-mêmes de la péninsule se laissent aller à d’aussi funestes erremens, quand il leur serait si facile au contraire de rattacher à la défense de ses destins toutes les sympathies du monde civilisé. Le problème de la régénération du peuple italien se pose de lui-même, comme nous le disions tout à l’heure, en des termes bien simples : étant donné les