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sance des agens essentiels de la nature, comme l’expérience d’OErsted fut le point d’où partit Ampère pour établir que tous les phénomènes de l’aimant ne sont que des effets électriques.

Avant ce puissant génie, les physiciens étaient forcés d’admettre deux agens spéciaux, l’un pour le magnétisme, l’autre pour l’électricité. Ampère, en ramenant le magnétisme à l’électricité, simplifia la nature et rehaussa, comme Newton, l’intelligence humaine en agrandissant son domaine. Sa gloire, comme celle de tous les savans qui, suivant l’expression de Fresnel, n’ont point courtisé la renommée, grandit d’année en année depuis sa mort, et grandira indubitablement encore dans la postérité.

La belle théorie d’Ampère, qui malheureusement n’est pas susceptible d’une exposition élémentaire, peut être donnée comme une définition théorique du magnétisme, qui sera dans ce sens regardé comme étant le résultat de l’action de courans électriques convenablement disposés autour des particules de l’aimant. Le magnétisme du globe terrestre dans la même théorie sera dû à des courans électriques allant de l’est à l’ouest, courans dont l’existence ne peut être révoquée en doute. Quand on songe du reste que tout l’organisme vital des plantes et des animaux fonctionne par l’électricité, on ne peut assez s’étonner que l’agent dont Thaïes notait seulement dans l’électron les attractions à distance soit devenu, pour ainsi dire, dans la nature inanimée comme dans la nature vivante, le principe fondamental de la constitution des êtres. L’électricité, c’est tout.

Oserons-nous faire un pas de plus et regarder l’électricité elle-même comme un des effets de ce fluide subtil, universel, dont la lumière et la chaleur démontrent presque mathématiquement l’existence, et dont le nom emprunté à Aristote, l’éther, nous représente aujourd’hui un milieu qui est pour la lumière et la chaleur ce que l’air est pour le son et pour le bruit? Métaphysiquement, et pour les esprits ambitieux que le doute et l’ignorance irritent et humilient, les spéculations sur le possible ou même sur l’inconnaissable peuvent avoir leur charme. Les bons esprits savent ignorer et attendent pour savoir. Dans les sciences d’observation, on fait peu de cas des théories qui ne se traduisent pas en découvertes de fait. Un de nos vieux proverbes dit : « Tant vaut le métier, tant vaut l’homme. » Disons que dans les sciences positives tant valent les applications, tant vaut la théorie.

Beaucoup de personnes sensées, en apprenant que le magnétisme a été expliqué par l’électricité, se figurent qu’on a pénétré le secret de ses attractions et répulsions. Rien de pareil. Seulement on a fait dépendre celles-ci des attractions et des répulsions des courans électriques, qui restent d’ailleurs elles-mêmes complètement inconnues dans leur nature. Au lieu de deux agens hypothétiques, on n’en a