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qui n’arrive point. Cette récolte est bonne pourtant, car l’air agit chimiquement sur les sels du sol, une série de combinaisons bien connues se produit, et certains sels insolubles deviennent ainsi propres à être absorbés, des matières organiques se décomposent et augmentent la proportion d’ammoniaque. Si l’on peut dire avec Virgile :

Saepe etiam stériles incendere profuit agros,
Atque levem stipulam crepitantibus urere flammis,


c’est que l’écobuage ou le brûlis dessèche l’argile du sol, la rend friable et propre à absorber, comme toute substance poreuse, les produits organiques volatils. En même temps le carbonate de chaux est décomposé, et la chaux non carbonatée est plus assimilable. Les labours détruisent les mauvaises herbes, facilitent l’extension des racines, mais aussi mélangent les engrais, aident aux combinaisons, et, en retournant le sol, permettent à toutes ses parties de s’oxyder au contact de l’air. Si des fumiers excellens n’ont pas agi, c’est qu’ils étaient d’une décomposition difficile, et les chimistes savent distinguer ceux qui sont dans ce cas. Ainsi les débris des roches feldspathiques, qui forment des terrains très alcalins, ne sont pas tout d’abord fertiles, même pour des plantes alcalines, car le feldspath a besoin d’être décomposé pour devenir assimilable. Si le sel semble nourrissant, cela tient à ce qu’il favorise d’abord mécaniquement l’absorption, qu’il est antiseptique, empêche l’altération des sucs, et surtout qu’il fournit à l’estomac un acide, l’acide chlorhydrique, qui fait la base du suc gastrique, et au sang la soude dont il a besoin.

Il serait trop long de répondre à tout, et d’ailleurs, si quelquefois on ne le pouvait point, si l’on s’était trompé, que conclure ? Qui ne s’est pas trompé ? Il est certain que, sur la production de la graisse, l’opinion d’abord répandue, et qui semblait prouvée, est fausse. On croyait que les animaux ne pouvaient faire de la graisse, et qu’ils puisaient toute la leur dans les alimens, qu’ils l’oxydaient seulement plus ou moins pour faire du suif, du beurre ou de la graisse de porc. Les expériences de deux grands chimistes semblaient démontrer qu’un bœuf gras a toujours moins de graisse qu’on ne lui en a donné, car le foin en contient 35 grammes, le trèfle fané 40 grammes, la paille d’avoine 51 grammes, le maïs 88 grammes, la pomme de terre seulement 0gr, 9, et la betterave 1gr, 1 par kilogramme ; mais d’autres observations sur les abeilles ont prouvé que celles-ci produisent cinq fois plus de cire qu’elles n’en absorbent. Des porcs pesant 200 kilogrammes, dont 84 kilogrammes de graisse, ne mangent que 500 kil. de faînes ou 600 kil. de glands, c’est-à-