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en serait de même de tous les sels ammoniacaux. Toutes les substances qui composent les plantes se retrouvent dans les minéraux. Remarquons pourtant que dans l’état actuel de la science une différence subsiste. Les sels minéraux que nous considérons maintenant existent dans la plante avec une composition et une forme toujours identiques, qu’il s’agisse du blé, de la pomme de terre ou de l’acacia, tandis que les autres substances y forment des combinaisons infinies, du gluten, de la cellulose, de la fécule, de la légumine, du sucre.

La quantité de sels enlevée par une récolte peut aller jusqu’à 330 kilog. par hectare ; elle est à peu près de 220 kilog. pour le blé, de 199 kilog. pour les betteraves, de 330 kilog. pour les topinambours. L’important est de restituer tout cela, et il y a ici deux choses à considérer : quand on met un engrais sur un champ, fort rarement cet engrais est un sel pur ; c’est tantôt du fumier de ferme, tantôt de la chaux ou de la marne, des débris végétaux, de la tangue, des os et mille autres choses. Les sels que contiennent ces substances sont très variés, et ne peuvent être enlevés par une seule récolte, non-seulement en quantité, mais en qualité ; ainsi telle plante prendra le phosphate de chaux, telle autre le sulfate ou le silicate de potasse ; en un mot, chaque récolte tend à épuiser le sol d’une manière spéciale. Or les engrais sont chers et la main-d’œuvre dispendieuse ; il importe donc de ne rien perdre et d’enlever au sol, sous une forme assimilable pour les animaux, tout ce qu’on y a mis sous la forme de caput mortuum. Si une plante ne suffit pas pour cela, il faut en semer une autre douée de propriétés différentes. Il faut, lorsqu’on a enlevé la potasse apportée, prendre la chaux et la silice ; il faut en un mot varier les cultures, il faut inventer les assolemens.

C’est la chimie seule qui peut enseigner le meilleur assolement pour un terrain dont la composition est connue. La facilité des transports ou de la communication, le voisinage d’une grande ville ou d’une usine importante, peuvent assurément influer sur le choix ; mais un assolement contraire aux principes de la chimie est destiné à ruiner en peu d’années le cultivateur, soit en enlevant à la terre plus de sels qu’elle n’en reçoit chaque année, soit en ne prélevant qu’une certaine espèce de sels. Il est toujours facile de céder à ces nécessités de situation, car ce n’est pas une certaine plante seule qui a des propriétés particulières, ce sont des familles entières qui se ressemblent, et entre lesquelles chacun peut choisir suivant son goût ou son intérêt. Ainsi le maïs, le navet, la betterave, la pomme de terre épuisent le sol, surtout en potasse ; le tabac, le trèfle et le sainfoin prennent surtout la chaux ; l’avoine, l’orge et le froment,